En entrevue avec La Presse, le commissaire de la LHJMQ fait le point après l’aveu de culpabilité de deux anciens joueurs des Tigres

(Québec) Le grand patron de la Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ) espère que l’aveu de culpabilité de deux anciens joueurs des Tigres de Victoriaville, dans une affaire d’agression sexuelle, en fera réfléchir plus d’un.

Ce qu’il faut savoir

  • Deux ex-joueurs des Tigres de Victoriaville accusés d’agression sexuelle ont plaidé coupable cette semaine.
  • Le commissaire de la LHJMQ veut rencontrer les dirigeants des Tigres de Victoriaville dans les prochains mois, mais il exclut pour l’instant une enquête interne.
  • La LHJMQ a mis en place une série de mesures pour former les adultes qui encadrent les jeunes hockeyeurs et pour sensibiliser ces derniers à la notion de consentement.
  • La peine des deux ex-joueurs des Tigres est attendue dans les prochains mois.

« Les jeunes ont encore un exemple aujourd’hui que personne n’est au-dessus de la loi. Si tu fais des conneries, tu vas payer pour », a lancé le commissaire de la LHJMQ, Mario Cecchini, dans une entrevue avec La Presse.

On a des jeunes au début de leur vie qui risquent la prison. J’espère que ça va parler à plusieurs.

Mario Cecchini, commissaire de la LHJMQ

Dans une longue entrevue, Mario Cecchini a détaillé les mesures mises en place par la Ligue pour prévenir les cas d’agression sexuelle. Il s’est aussi engagé à rencontrer dans les prochains mois la direction des Tigres pour faire un retour sur toute cette affaire, mais n’envisage pas une enquête formelle pour l’instant.

Nicolas Daigle et Massimo Siciliano, accusés d’avoir agressé sexuellement une adolescente de 17 ans dans les heures suivant leur victoire en finale de la Coupe du président de la LHJMQ en juin 2021, ont plaidé coupable mercredi. Ils connaîtront leur peine ultérieurement.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Les anciens joueurs des Tigres de Victoriaville, Massimo Siciliano (à gauche) et Nicolas Daigle

L’affaire a fait grand bruit dans le monde du hockey québécois. Elle survient dans la foulée du scandale de Hockey Canada. Rappelons qu’une jeune femme allègue avoir été agressée sexuellement par huit joueurs d’Équipe Canada junior en Ontario en juin 2018.

Formations sur le consentement

Tous ces évènements ont incité la Ligue à en faire davantage, indique le commissaire. L’année dernière, la documentariste Léa Clermont-Dion a offert une formation sur le consentement aux hockeyeurs. Les 450 joueurs devront cette année encore suivre un webinaire sur le même sujet.

L’humain étant humain, on avait tendance à excuser un geste qui peut paraître anodin dans un contexte. Là, on dit aux gens qu’il ne faut pas excuser ça, il faut que ça nous allume pour intervenir pour que ça n’aille pas plus loin. Le message principal, c’est d’être alertes.

Mario Cecchini, commissaire de la LHJMQ

Les entraîneurs et le personnel sont aussi formés sur ces questions délicates. « Les adultes ont vraiment une pression énorme » en ce moment dans le hockey, selon le commissaire. « C’est comme être parent de 25 enfants », illustre-t-il, parlant des entraîneurs.

« On ne peut pas leur demander d’être à la fois entraîneurs de hockey, psychologues, conseillers pédagogiques… On les a entourés de spécialistes, il y en a plus qu’avant », assure celui qui a succédé à Gilles Courteau.

À la défense des jeunes hockeyeurs

Selon le commissaire, l’agression sexuelle survenue après la victoire des Tigres en 2021 ne témoigne pas précisément d’une culture toxique au hockey. Rappelons qu’un des joueurs avait filmé l’agression avant de montrer la vidéo à des coéquipiers et à un entraîneur. C’est finalement la victime, accompagnée de sa mère, qui s’était rendue dans un poste de police pour porter plainte.

« Quand on parle de comportements à éradiquer, c’est dans la société, pas dans le hockey », dit-il.

« Je ne banalise pas le comportement. Mais comme dans la société, c’est une infime minorité de nos 450 joueurs qui ont ce genre de comportements là », lance le commissaire.

J’ai tout le temps peur que les gens pensent que c’est 50 % de nos jeunes qui sont comme ça.

Mario Cecchini, commissaire de la LHJMQ

La Ligue assure donc prendre très au sérieux la question des agressions sexuelles, tout comme la question des initiations qui vont trop loin (rappelons que la LHJMQ est la cible d’une demande d’action collective concernant le bizutage).

Mais le commissaire estime qu’il serait illusoire de penser que tout pourra se régler du jour au lendemain à coups de formations. Il cite l’exemple des cas de conduites en état d’ébriété qui se comptent chaque année par centaines au Québec malgré les campagnes de sensibilisation.

Natasha Llorens, directrice des services aux joueurs de la LHJMQ, indique d’ailleurs que les deux anciens joueurs des Tigres condamnés pour agression sexuelle avaient suivi une formation au cégep de Victoriaville sur la notion de consentement.

« Ils avaient même vu une sexologue venue parler des notions de consentement. Donc ce n’est pas parce que des choses n’avaient pas été faites », dit-elle.

N’empêche que l’énoncé de la peine des deux hockeyeurs, attendue dans les prochains mois, aura certainement un grand retentissement. « J’espère que si du positif peut sortir de ce qui est arrivé, c’est que ça éclaire les jeunes pour prévenir d’autres situations malheureuses », lâche Mario Cecchini.