Les projecteurs de la commission Charbonneau, qui reprend ses audiences aujourd'hui, resteront tournés sur Montréal dans les semaines à venir. La démonstration du lien entre le truquage des contrats et le financement des partis reste à faire, de sorte que le programme des cinq prochains mois s'annonce chargé même si le temps, lui, est compté.

En novembre, les audiences publiques ont causé un certain émoi lorsqu'elles ont pris fin abruptement sur la présentation d'une liste de «rencontres d'intérêt» tenues au club privé 357c. Plusieurs ont déploré le fait qu'on laisse planer un doute sur la probité d'une dizaine d'élus qui y ont rencontré l'entrepreneur Paolo Catania, actuellement accusé de corruption.

Mais avant de poursuivre sur cette lancée, la Commission doit d'abord tenter de dissiper un autre malaise qui a surgi par rapport à l'un des témoignages marquants de l'automne. L'ex-organisateur politique Martin Dumont, qui avait établi un lien direct entre un cartel de la construction et le financement du parti Union Montréal, devra revenir devant les commissaires pour s'expliquer.

Le tout premier témoin prévu est d'ailleurs Alexandra Pion, réceptionniste d'Union Montréal qui, selon le témoignage de Dumont, se serait plainte d'avoir à compter d'importantes quantités d'argent liquide. Si, comme plusieurs sources l'avancent, elle contredit l'ex-organisateur, celui-ci devra fournir de bonnes explications pour éviter d'être accusé de parjure.

Plusieurs sources indiquent que les audiences continueront à s'intéresser à la région de Montréaldans les prochaines semaines. Les enquêteurs ont rencontré l'ex-maire Gérald Tremblay pour la deuxième fois à la mi-décembre, et le maire actuel, Michael Applebaum, a aussi dû répondre à leurs questions il y a deux semaines. Cela laisse croire que le sujet du financement d'Union Montréal n'a pas été vidé.

La liste des rencontres de Paolo Catania au 357c maintiendra également l'attention des audiences sur Montréal. Plusieurs personnes nommées ont toutefois été arrêtées relativement à l'affaire du Faubourg Contrecoeur, et leur récente décision de passer directement à procès pourrait empêcher la Commission de vider le sujet. Néanmoins, la liste devrait permettre aux audiences de déborder de la sphère municipale puisque plusieurs participants aux rencontres sont davantage associés à la politique provinciale.

La question du rôle des syndicats attendra quant à elle plusieurs semaines, possiblement après une pause de deux semaines prévue au début du mois d'avril.

Du pain sur la planche

Comme la Commission doit produire son rapport à l'automne, plusieurs personnes constatent que le temps commence à manquer. Les audiences publiques doivent en effet prendre fin d'ici à la Saint-Jean. Le décret gouvernemental donne à la Commission jusqu'au 19 octobre pour remettre son rapport, ce qui laisserait un maximum de 64 jours pour entendre des témoins. Rappelons que la Commission siège du lundi au jeudi, trois semaines sur quatre.

Or, depuis le début des audiences, 31 témoins ont été entendus en 48 jours. À ce rythme, une quarantaine de témoignages supplémentaires pourront être entendus. Comme les audiences publiques ont à peine effleuré le financement politique, le rôle des syndicats et les contrats du ministère des Transports, plusieurs jugent le délai trop serré pour faire complètement le tour de la question de la collusion et de la corruption d'ici à l'été. Un prolongement du mandat leur semble donc inévitable.