(Montréal) Les universités de langue anglaise du Québec se préparent aux conséquences financières potentielles de la décision de la province de presque doubler les frais de scolarité pour les étudiants de l’extérieur de la province.

À l’Université McGill de Montréal, la nouvelle a déjà eu un impact puisque les administrateurs disent évaluer la perte potentielle de revenus si les étudiants de l’extérieur du Québec devaient choisir d’aller ailleurs plutôt que de payer les nouveaux frais plus élevés.

Dans la foulée de la sortie du gouvernement du Québec, l’université a reporté l’annonce d’un investissement de 50 millions dans des programmes destinés à aider les étudiants, les professeurs et le personnel à développer leurs compétences en français et à « mieux s’intégrer à la société québécoise », a indiqué McGill dans un communiqué jeudi.

Dans une lettre adressée lundi à la communauté de McGill, le principal Deep Saini a mis en garde contre de « graves conséquences » pour l’université. Il a demandé à « ceux qui sont responsables des dépenses d’être prudents » pendant que les administrateurs étudient les effets possibles de l’augmentation des frais de scolarité — une hausse d’environ 8000 $ pour les étudiants canadiens de l’extérieur de la province.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

La ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry

Vendredi dernier, le gouvernement du Québec a annoncé que les frais de scolarité pour les étudiants de premier cycle des autres provinces passeraient de 8992 $ à environ 17 000 $ par année à compter de l’automne prochain. La ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, a également déclaré que le gouvernement facturerait 20 000 $ aux universités pour chaque étudiant international qu’elles recrutent.

La décision devrait toucher principalement les trois universités anglophones de la province — McGill, Concordia et Bishop’s — qui accueillent plus de non-Québécois que les universités francophones. M. Saini a averti que la hausse des frais de scolarité pourrait dissuader les futurs étudiants de McGill des autres provinces et territoires, qui représentent actuellement 20 % de la population étudiante.

Le premier ministre François Legault a défendu cette décision, affirmant que les contribuables québécois ne devraient pas subventionner les étudiants des autres provinces et qualifiant l’afflux d’étudiants anglophones de menace à la survie de la langue française.

Le principal de l’Université Bishop’s, Sébastien Lebel-Grenier, affirme que l’impact financier de la hausse des frais de scolarité pourrait être « catastrophique » pour son établissement de Sherbrooke, où près de 30 % des étudiants viennent d’autres provinces.

Nous envisageons une perte potentielle du quart de nos revenus. Pour une université, ce n’est pas quelque chose que l’on peut gérer, un changement aussi important du jour au lendemain.

Sébastien Lebel-Grenier, principal de l’Université Bishop’s

Il a affirmé que l’université espère discuter avec le gouvernement du Québec pour trouver un arrangement qui « permettra à Bishop’s de continuer », mais a mis en garde contre des « choix difficiles, voire impossibles », y compris des réductions de dépenses, si la province met en œuvre la hausse comme prévue.

« Nous disposons déjà de marges très minces et nous sommes extrêmement prudents dans nos dépenses, a-t-il ajouté. Il est difficile d’imaginer comment nous pourrions réduire les dépenses. »

L’inquiétude quant à l’avenir des universités anglophones du Québec s’est également fait sentir au sein de la population étudiante cette semaine.

« Je crains que cette politique proposée puisse être une condamnation à mort », a déclaré Sophia Stacey, présidente du Conseil représentatif des étudiants de l’Université Bishop’s.

Mme Stacey — qui est originaire de l’Alberta et a déclaré qu’elle est venue au Québec pour apprendre le français — ne sera pas soumise aux nouveaux droits de scolarité puisqu’ils s’appliquent aux étudiants qui commencent l’automne prochain ou plus tard. Mais elle a déclaré que l’augmentation aurait rendu la facture prohibitive pour l’inscription à Bishop’s.

« Si je m’imagine à 17 ans, il y a quelques années, postulant à l’université… Je n’aurais pas pu venir à Bishop’s, malgré mon enthousiasme », a-t-elle soutenu.

Avec des informations de Sidhartha Banerjee