Le Québec a été le champ de bataille pour trois des quatre chefs des grands partis fédéraux, mardi, ce qui a contraint Gilles Duceppe à défendre son territoire.

Le chef conservateur Stephen Harper a entrepris sa journée à Victoriaville, où il a promis, dans un poste de pompiers, que son gouvernement, s'il est réélu, verserait une compensation au gouvernement du Québec pour l'harmonisation des taxes de vente. Il n'a toutefois pas précisé où il puiserait la somme de 2,2 milliards $ réclamée par Québec, dont il n'était aucunement fait mention dans le budget déposé en mars dernier par le ministre des Finances Jim Flaherty.

Le lieutenant politique de M. Harper au Québec, Christian Paradis, s'était déjà engagé la semaine dernière à conclure une entente avec Québec sur l'harmonisation des taxes d'ici la mi-septembre.

Quant au chef libéral Michael Ignatieff, qui faisait campagne à Charlesbourg puis à Drummondville, il a dit croire que les Québécois en ont assez d'un gouvernement conservateur loin de leurs valeurs, et que les électeurs de cette province choisiront un autre premier ministre le 2 mai.

Le chef libéral a déclaré que les électeurs du Québec ont le choix entre un chef conservateur qui entretient les divisions ou un chef libéral qui a à coeur leurs préoccupations.

«Pour les Québécois, c'est un choix de premier ministre et nous allons dire de façon claire que les Québécois peuvent changer les choses, ils peuvent choisir le prochain premier ministre du Canada - j'espère un Canadien plus près des valeurs des Québécois», a fait valoir M. Ignatieff.

M. Duceppe a rapidement réagi à ces propos, accusant son adversaire libéral d'être loin des valeurs québécoises.

M. Duceppe a rappelé que M. Ignatieff est opposé à l'assujettissement des institutions sous juridiction fédérale à la loi 101, au Québec.

«La langue, c'est fondamental, a-t-il dit lors d'un point de presse. La langue, c'est le respect de ce que nous sommes, de ce que nous valons et de ce que nous voulons être. Alors M. Ignatieff ne respecte pas ça.»

En juin 2009, les libéraux et les conservateurs ont défait un projet de loi du Bloc québécois ayant pour but de faire appliquer la loi 101 dans les entreprises fédérales, dont celles des secteurs bancaire, des télécommunications ainsi que dans le transport maritime, aérien et ferroviaire.

M. Ignatieff ainsi que le chef conservateur Stephen Harper étaient absents au moment du vote.

«Il n'est pas pour ça, M. Ignatieff», a soutenu le chef bloquiste.

Quant à l'engagement de M. Harper de verser au Québec une indemnisation pour l'harmonisation de la TPS et de la TVQ, M. Duceppe s'est montré sceptique.

«M. Flaherty nous dit que ce sera exactement le même budget, il a dit ça lundi. Et M. Paradis nous dit: «non, non, le 2,2 va être dedans'. (...) Je ne sais plus de quel budget il parle actuellement», a lancé le chef bloquiste, alors qu'il se trouvait à Pointe-au-Père, dans le Bas-St-Laurent, notant que les deux ministres du gouvernement Harper se contredisent.

Layton attaque les conservateurs

Jack Layton s'est lancé dans une charge à fond de train contre les conservateurs.

De passage à Winnipeg, le chef du Nouveau Parti démocratique a mis de côté temporairement une annonce en matière familiale pour dresser une liste de présumés scandales impliquant le gouvernement fédéral sortant. L'affaire Bruce Carson, un ex-conseiller de Stephen Harper qui a été condamné à cinq reprises pour fraude, figurait notamment sur cette liste.

M. Layton en a profité pour lancer certaines de ses plus dures critiques concernant l'éthique du gouvernement sortant depuis le début de la campagne électorale. Jusqu'à présent, les néo-démocrates avaient surtout parlé des solutions qu'ils proposent pour divers problèmes.

M. Layton a nié qu'il changeait de stratégie pour détourner l'attention à un moment où son parti livre une âpre bataille contre les libéraux pour obtenir la faveur de l'électorat de gauche.

Revers en cour pour les verts

Le Parti vert a pour sa part perdu sa bataille pour une place aux débats télévisés des chefs de la semaine prochaine.

Mais sa chef, Elizabeth May, ne jette pas encore l'éponge.

Le juge Marc Nadon, de la Cour fédérale, a décidé mardi midi de ne pas entendre la cause avant le premier débat prévu mardi prochain. Le court délai ne permettrait pas au tribunal de «remplir ses obligations de façon satisfaisante», a-t-il tranché, ajoutant qu'une décision plus détaillée serait publiée vendredi.

Il s'agit d'une défaite majeure pour le Parti vert, dont l'appui populaire avait augmenté après la participation de la chef May lors de la campagne électorale de 2008.

Les verts avaient demandé mardi à la Cour fédérale d'entendre la cause rapidement, dans l'espoir que Mme May puisse participer aux débats prévus les 12 et 14 avril.

Malgré la décision de mardi, Elizabeth May reste déterminée. «Nous continuons de demander aux Canadiens d'exercer de la pression sur les autres leaders politiques et sur les dirigeants du consortium, afin qu'ils changent d'avis», a-t-elle affirmé en entrevue.

Le Parti vert en appellera de la décision, même si la cause ne pourra être entendue à temps pour les débats en Cour d'appel fédérale, a promis Mme May. L'avocat des verts sera aussi consulté pour examiner «toute avenue juridique» qui leur permettrait de faire entendre leur cause plus rapidement.