Pour stimuler l’immigration dans sa région, la mairesse Julie Dufour veut faire de sa ville, Saguenay, une ville étudiante qui attire, forme et, surtout, retient des jeunes venus d’ailleurs.

La Presse : Quelles sont vos forces ?

Julie Dufour : En région, on est assez gros pour faire de l’attractivité, mais on est encore assez petits – entre guillemets – pour se connaître. C’est rapide pour une mairesse comme moi de faire une rencontre avec le recteur et les directeurs généraux des deux collèges. On se connaît, on se côtoie.

Il y a une proximité des individus qui fait que, quand on décide de se mobiliser, c’est beaucoup plus rapide.

En 2018, un comité ville étudiante a été instauré. Auparavant, il n’y avait pas de communication entre les maisons d’enseignement et la Ville. Depuis, des ententes ont été conclues, notamment pour la mobilité de nos étudiants. Un plan stratégique a été adopté : accueil des étudiants, services, partenariats… Cela a eu un effet boule de neige.

Quel rôle jouent les étudiants étrangers ?

Ça permet à nos maisons d’enseignement de rester vivantes. On était une région en décroissance démographique. On commence à avoir une croissance.

Souhaitez-vous accueillir davantage d’étudiants ?

On a un taux d’inoccupation de 0,9 %. C’est du jamais vu. Et on ne peut pas construire des maisons en deux jours. Ça prend une gestion parce que, sinon, on crée plus de problèmes que de solutions. À l’automne, on n’était même pas capables de loger les étudiants qui s’en venaient. Tout est dans l’équilibre. Avec 0,9 %, on a atteint un point assez fragile d’équilibre.

Il faut mieux se préparer. Il faut s’assurer que ceux qu’on accueille déjà, on les accueille bien, d’une façon différente, en collaboration avec les villes, en collaboration avec les entreprises, pour s’assurer que ça se passe bien et qu’on ne crée pas de problème.

Quels sont les attraits de Saguenay ?

On est la deuxième ville au Canada où l’accès à la propriété est le plus facile, pour les mêmes salaires. Une maison à Saguenay de 200 000 $, 300 000 $, c’est l’équivalent de 1,5 million à Montréal. Donc, l’accès à la propriété, surtout chez les jeunes, qui ne voient plus le bout d’y arriver dans les grands centres, à Saguenay, c’est possible. Et on ajoute à ça la qualité de vie. J’ai deux centres de ski dans ma ville, à 15 minutes de voiture. Dans le centre-ville de Jonquière, il y a des gens qui, sur leur pause de dîner, vont pêcher dans la rivière.

Je dis souvent, le Saguenay a absolument tout ce que les grands centres ont, sauf une chose : le trafic. Il n’y en a pas. On est un des endroits en Amérique du Nord où faire 100 km de voiture est le plus rapide.

Comment réagit la population locale ?

C’est sûr que régionalement, on n’est pas nécessairement habitués de voir des gens d’une autre culture. Il y en a eu certains. Dans les années 1960-1970, on avait accueilli une communauté libanaise, entre autres. On les connaît tous à Saguenay. Ils font partie de la famille. Mais d’arriver, plus massivement, avec des gens de plusieurs communautés, c’est sûr que, pour certains, ça occasionne des écueils.

Donc, la question, c’est : comment on est capables d’améliorer notre accueil dans le respect de la culture québécoise, mais en évitant des conflits causés par de la mauvaise compréhension des cultures de part et d’autre ?