La qualité de l’air est de plus en plus souvent mauvaise à Montréal depuis la relance postpandémique, une situation attribuable principalement à l’augmentation du nombre de voitures sur les routes et… au retour des grands feux d’artifice de La Ronde.

Ce qu’il faut savoir

• Il y a eu 33 jours où la qualité de l’air était mauvaise en 2022 sur l’île de Montréal.

• Le nombre de jours de mauvaise qualité de l’air retrouve les niveaux prépandémiques.

• Le transport routier est le principal responsable de la mauvaise qualité de l’air.

Avec 33 jours où la qualité de l’air était mauvaise en 2022, dont 4 de smog, la métropole a retrouvé la moyenne des années précédant la pandémie de COVID-19, montre le bilan annuel du service de l’environnement de la Ville de Montréal, qui sera rendu public jeudi.

C’est trois fois plus que le creux de 11 jours enregistré en 2020, année des grands confinements.

« L’augmentation de l’utilisation de la voiture en solo pour les déplacements des travailleurs, [liée à] la reprise des activités économiques et sociales, a grandement contribué à cette hausse », affirme le document.

C’est notamment pour cette raison que les quartiers centraux avaient connu davantage de journées où l’indice de la qualité de l’air était bon, plutôt qu’acceptable ou mauvais, observe Fabrice Godefroy, chef de section au Réseau de surveillance de la qualité de l’air (RSQA) de la Ville de Montréal. « La qualité de l’air est moins bonne proche des carrefours autoroutiers », ajoute M. Godefroy.

Feux d’artifice

Le retour en 2022 de l’International des Feux Loto-Québec, après une pause forcée par la pandémie, a contribué à noircir le bilan.

Ces grands spectacles pyrotechniques sont responsables à eux seuls de 5 des 33 journées de mauvaise qualité de l’air, soit 15 % du total, indique le bilan.

Lors des feux d’artifice du 3 août, le taux de particules fines dans l’air du quartier Hochelaga-Maisonneuve a atteint 379 μg/m⁠3, une concentration supérieure au taux de 303 μg/m⁠3 enregistré à New York sous la fumée des incendies de forêt, le 7 juin dernier.

« À ces concentrations-là, on a un risque très sérieux pour la santé de la population, [surtout chez] les plus vulnérables », indique Alexandre Barris, toxicologue de la Direction régionale de santé publique de Montréal.

PHOTO HUGO-SEBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Les grands spectacles pyrotechniques sont responsables à eux seuls de 5 des 33 journées de mauvaise qualité de l’air à Montréal, soit 15 % du total, indique le bilan.

Dans le quartier Anjou, à environ 8,6 km du site des feux d’artifice, la concentration horaire de particules fines a atteint ce soir-là 157 μg/m⁠3.

De nombreux produits chimiques, en particulier des sels métalliques, sont utilisés en pyrotechnie pour produire des couleurs vives et des effets visuels, explique le bilan.

« Certains de ces composés sont relâchés lors de leur explosion et peuvent avoir des effets néfastes sur l’environnement et sur la santé humaine », indique le document, précisant que l’aspect éphémère de l’évènement réduit le temps d’exposition aux émissions.

L’administration de la mairesse Valérie Plante n’envisage pas pour autant de mettre fin à la célèbre compétition de feux d’artifice, qui est une source de contamination ponctuelle, souligne Marie-Andrée Mauger, responsable de la transition écologique et de l’environnement au Comité exécutif et mairesse de l’arrondissement de Verdun.

Les principales sources de contamination à Montréal, c’est le transport ; ça, c’est une source au quotidien, structurelle, [et] on veut travailler sur des solutions structurelles.

Marie-Andrée Mauger, responsable de la transition écologique et de l’environnement au Comité exécutif de la Ville de Montréal

Les feux d’artifice avaient été responsables d’une seule journée de mauvaise qualité de l’air en 2019, de cinq en 2018 et d’aucune en 2017.

Plus de jours, mais moins de contaminants

Même si le nombre de jours où la qualité de l’air est mauvaise est à la hausse, la concentration de particules fines, elle, « est à la baisse depuis plusieurs années », indique le bilan.

La moyenne annuelle de toutes les stations d’échantillonnage de Montréal pour les particules fines était de 7,1 μg/m3, en 2022 – le bilan ne précise pas les taux pour les années précédentes individuellement, mais indique que la moyenne triennale de 2020 à 2022 a été de 7,2 μg/m3.

« Il subsiste encore des effets à la santé, et potentiellement des décès prématurés », souligne le toxicologue Alexandre Barris.

Les effets à court terme, lors de pics de pollution, peuvent être des problèmes respiratoires, comme des crises d’asthme ou l’inflammation des voies respiratoires, le picotement des yeux ou des problèmes cardiovasculaires, énumère-t-il.

Il peut y avoir une augmentation des hospitalisations pendant les périodes de smog et potentiellement une augmentation des décès.

Alexandre Barris, toxicologue de la Direction régionale de santé publique de Montréal

À long terme, la pollution atmosphérique peut contribuer à l’apparition de l’asthme, notamment chez les enfants, de cancers, de problèmes cardiovasculaires ou de démence, poursuit M. Barris.

Parmi les autres causes de la mauvaise qualité de l’air, le bilan 2022 pointe les industries de l’est de Montréal, les cours de voirie de Montréal-Nord, le port de Montréal, le chauffage au bois et les incendies de bâtiments.

Tous ces facteurs sont par ailleurs influencés par les conditions météorologiques, souligne Fabrice Godefroy, du RSQA.

« Même si on a les mêmes sources de pollution, selon la météo, qu’il pleuve ou qu’il y ait du soleil ou du vent, ça va diluer la pollution, dit-il. Ça, c’est vraiment aléatoire. »

Qu’est-ce qu’une journée de mauvaise qualité de l’air ?

Une journée est considérée comme ayant une mauvaise qualité de l’air dès que les concentrations de particules fines (PM2,5) excèdent 35 microgrammes par mètre cube (μg/m⁠3) pendant au moins trois heures dans une station d’échantillonnage. Si de telles concentrations sont mesurées sur plus de 75 % du territoire de l’île de Montréal, on parle alors d’un jour de smog.

En savoir plus
  • 11
    Nombre de stations d’échantillonnage permanentes que compte le Réseau de surveillance de la qualité de l’air (RSQA) de Montréal
    Source : Ville de Montréal
    2
    Nombre de stations d’échantillonnage destinées à des projets spéciaux, dont une station nomade, que compte le Réseau de surveillance de la qualité de l’air (RSQA) de Montréal
    Source : Ville de Montréal