L’ancien responsable du dossier Publisac au sein de l’administration Plante estime que celle-ci a « trahi » les journaux locaux en refusant de les appuyer de façon plus substantielle au moment de limiter la distribution du sac de circulaires.

Ce qu’il faut savoir

L’ex-élu responsable du règlement sur le Publisac au sein de l’administration Plante jusqu’en 2021 estime que ses ex-collègues ont trahi les médias locaux.

Jean-François Parenteau travaillait à limiter de façon draconienne la distribution du sac de circulaires en pensant que les journaux distribués par ce véhicule recevraient une aide substantielle.

L’administration Plante affirme avoir fait ce qu’elle devait pour soutenir l’industrie.

Jean-François Parenteau, qui a siégé au comité exécutif pendant le premier mandat de Valérie Plante, a fait valoir en entrevue avec La Presse qu’un soutien financier de transition avait été promis aux journaux locaux, sans se concrétiser. Le Publisac, dont la distribution automatique est interdite depuis mai, constituait pour eux un réseau de diffusion à très faible coût.

Les journaux locaux se sont « fait passer un sapin, a-t-il tranché. Je trouve ça odieux, personnellement. […] Je ne trouve pas ça correct ».

PHOTO OLIVIER JEAN, ARCHIVES LA PRESSE

Jean-François Parenteau, ex-élu montréalais

L’administration Plante assure avoir respecté ses engagements, soulignant notamment avoir versé 2 millions aux journaux locaux l’automne dernier. « On a fait notre part », a dit Luc Rabouin, responsable du développement économique.

« Des promesses infinies »

Lors de la préparation du règlement sur le Publisac, en 2020-2021, « il y avait des garanties qui faisaient en sorte qu’ils pourraient passer à travers le virage sans écoper pour la perte de distribution », a dit M. Parenteau, ex-maire de l’arrondissement de Verdun et responsable de l’environnement au comité exécutif. « Je le sais, j’étais responsable du dossier à l’époque. »

La présentation du règlement qui tuait le Publisac tel qu’on le connaissait a été reportée de plusieurs mois et les « garanties » ont disparu après son départ du comité exécutif, a-t-il déploré.

On le savait que de la façon dont la structure financière des journaux locaux était faite, ils ne pourraient pas [survivre] si on ne faisait rien pour les aider. Il fallait un moment de transition. On planifiait quand même quelques mois pour assurer la transition. […] La mairesse s’était engagée.

Jean-François Parenteau, ex-élu montréalais

M. Parenteau a été un poids lourd de l’administration Plante, mais n’a jamais fait partie de Projet Montréal. Il avait été élu sous la bannière du parti de Denis Coderre en 2017, avant de quitter la formation politique pour siéger au comité exécutif.

L’élu dit vouloir appuyer la parole d’Andrew Mulé, PDG de Métro Média, qui impute à l’administration Plante la déconfiture de l’entreprise depuis la suspension de ses activités, il y a bientôt un mois.

L’appui financier de l’administration Plante à l’industrie n’avait jamais fait l’objet d’un contrat formel, mais plutôt d’engagements verbaux. Au moment où l’administration Plante cherchait des appuis pour son projet d’interdire le Publisac, elle aurait sollicité le patron de presse.

PHOTO JOSIE DESMARAIS, ARCHIVES LA PRESSE

Journal local de Métro Média

« La mairie vient avec des promesses infinies pour dire : inquiète-toi pas, on ne va pas laisser tomber Métro, c’est sûr qu’on croit dans la démocratie locale », a-t-il rapporté, en entrevue avec La Presse. « La réalité, c’est qu’il y a du monde qui manquait d’expérience, qui a fait des promesses qu’il n’était pas capable de soutenir. »

M. Mulé a le sentiment d’avoir été trahi par l’administration Plante. « C’est la seule façon de comprendre le portrait, a-t-il ajouté. C’est sûr qu’ils n’ont pas respecté leur parole, qu’ils ne sont pas passés à l’action. »

« On est passés de la parole aux actes »

Luc Rabouin est responsable du développement économique au comité exécutif depuis 2019. Il a siégé avec M. Parenteau au comité exécutif de Valérie Plante, mais a une vision complètement différente de ce dossier.

En entrevue téléphonique, l’élu confirme qu’il était chargé de développer le programme de soutien économique aux médias locaux qui devait accompagner l’interdiction de la distribution automatique du Publisac. Mais M. Rabouin fait valoir que cette aide a déjà été versée : la Ville de Montréal a lancé à l’automne 2022 un programme d’aide de 85 000 $ par journal local papier (pour un total de 2 millions).

« On avait réservé une somme de 2 millions de dollars pour soutenir la transition des modèles d’affaires des journaux, a dit M. Rabouin. On avait dit qu’on allait les aider. Et qu’on allait réserver l’argent. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, ARCHIVES LA PRESSE

On est passés de la parole aux actes. On s’était engagés à aider à la transition des modèles d’affaires. On l’a fait. Là-dessus, Métro Média est allé chercher 1,3 million, 60 % de l’enveloppe.

Luc Rabouin, responsable du développement économique au comité exécutif

Cette entreprise a aussi reçu de l’argent du gouvernement provincial, a souligné M. Rabouin, ajoutant qu’elle avait toutefois profité d’une année profitable pour verser un dividende de 2,6 millions à son actionnaire principal. « Il y a des limites à un moment donné à demander l’aide publique, a-t-il plaidé. L’entreprise elle-même décide de ne pas investir dans sa transition, mais de passer à la caisse. Quand j’ai appris ça, je suis un peu tombé en bas de ma chaise. »

Luc Rabouin a ajouté que la Ville de Montréal « discute avec plusieurs acteurs » du monde de l’information pour mettre en œuvre une solution de nouvelles microlocales.