L’ex-président du comité exécutif de la Ville de Montréal Frank Zampino, accusé de corruption dans une affaire d’octroi de contrats municipaux en échange de financement politique, devra finalement être jugé.

La Cour d’appel a ordonné vendredi la tenue du procès, quatre ans après que l’ex-numéro deux de la Ville et ses cinq coaccusés ont obtenu un arrêt des procédures.

L’ancien bras droit du maire Gérald Tremblay avait été arrêté en 2017 dans le cadre de l’opération Fronde. Mais la juge Joëlle Roy, de la Cour du Québec, avait jugé en 2019 que les droits constitutionnels de M. Zampino avaient été violés au cours de l’enquête, notamment par l’attribution d’un mandat d’écoute électronique qui visait des conversations entre lui et son avocate.

La juge Roy avait invalidé la preuve obtenue par cette technique par les enquêteurs de l’Unité permanente anticorruption (UPAC), et par le fait même l’ensemble de la preuve dans le dossier, en invoquant un « cafouillage » dans l’enquête.

L’arrêt du processus judiciaire touchait aussi les cinq coaccusés de Frank Zampino, Bernard Poulin et Dany Moreau, de la firme SM, Kazimierz Olechnowicz, de CIMA+, Normand Brousseau, de HBA Teknika, ainsi que Robert Marcil, ancien directeur des infrastructures et voirie à la Ville de Montréal. La Cour d’appel a également annulé la décision dans leur cas.

Tous avaient été accusés de fraude, de complot et de corruption dans le cadre d’un système d’attribution de contrats municipaux à des firmes de génie-conseil en échange de versement dans les coffres d’Union Montréal, alors dirigée par Gérald Tremblay, entre 2001 et 2009.

« La juge a erré »

Les enquêteurs de l’UPAC avaient été autorisés, dans le cadre du projet Fronde, à intercepter les conversations de 39 « cibles », y compris les communications avec des personnes inconnues. L’écoute électronique a permis l’interception de certaines conversations entre Frank Zampino et son avocate, conversations dont le secret professionnel doit être protégé.

Mais selon la Cour d’appel, même si les policiers ont été négligents dans l’opération d’écoute électronique, ces gestes ne sont pas d’une gravité qui justifie un arrêt du processus judiciaire.

Une telle enquête policière exige parfois des moyens d’une grande ampleur, et les enquêteurs n’ont pas utilisé de procédures abusives, notent les juges Manon Savard, François Doyon et Patrick Healy.

Ils soulèvent par ailleurs plusieurs erreurs de droit de la juge Joëlle Roy, ainsi qu’une mauvaise évaluation de la preuve. « La juge a erré en concluant que l’arrêt des procédures était nécessaire pour prévenir une injustice persistante envers M. Zampino », écrivent-ils dans leur jugement.

« À titre de remède, la Cour ordonne plutôt l’exclusion de la preuve issue de l’écoute électronique. Elle infirme les jugements de première instance et ordonne la tenue d’un procès », peut-on lire dans le résumé de la décision rendue par la Cour d’appel.

Frank Zampino a aussi été accusé, puis acquitté en 2018, pour fraude, complot et abus de confiance dans le scandale du Faubourg Contrecœur.