Noémie* tient son bébé de 10 mois dans ses bras. Vite, elle doit supprimer ses messages aux policiers. Son bourreau ne doit surtout pas les voir. Enragé, Yannick Martel la poignarde avec un couteau. Elle le repousse, mais le forcené s’acharne sur elle. Même le bébé est poignardé. Une scène d’horreur.

Ce qu’il faut savoir

  • Une mère et son bébé de 10 mois ont été poignardés par Yannick Martel en 2021 dans un contexte de violence conjugale.
  • L’homme de 45 ans a plaidé coupable mardi à plusieurs chefs d’accusation, dont tentative de meurtre.
  • Il a été condamné à 14 ans de pénitencier.

L’histoire de Noémie est l’histoire d’un quasi-féminicide. La jeune mère de Lanaudière a bien failli s’ajouter ce soir-là d’automne à la liste record de femmes assassinées par leur conjoint ou ex-conjoint en 2021. Une vague de féminicides avait déferlé sur le Québec cette année-là.

Yannick Martel, un homme de 45 ans de Salaberry-de-Valleyfield, a plaidé coupable mardi au palais de justice de Joliette à des accusations de tentative de meurtre, de voies de fait armées et de voies de fait causant des blessures sur un bébé. Le juge André Vincent a entériné la suggestion commune des avocats et lui a imposé une peine de 14 ans de détention.

Des problèmes dès le début

L’histoire de Noémie en est une de violence psychologique, de contrôle et de jalousie extrême. Dès le début de leur brève relation, Yannick Martel installe son emprise sur sa nouvelle conquête. Extrêmement jaloux, Martel pense constamment que Noémie est en train de le tromper.

Après quelques semaines, Noémie tente de couper les liens. Elle l’expulse de chez elle et le bloque de ses réseaux sociaux. Mais Martel revient toujours vers elle.

Un matin, Martel insulte Noémie de façon dégradante par message texte et lui envoie un sinistre message vocal : « Appelle-la, la police. Tu vas finir avec une lame dans la gorge, esti de conne. »

Le jour même, Martel débarque chez Noémie sans avertissement pour se « réconcilier ». Il repart toutefois contrarié puisque des amis sont avec elle. Mais vers 23 h, Martel revient sans invitation et se glisse à côté d’elle dans son sommeil. Ils ont alors des rapports intimes. Martel accuse la femme de ne plus l’aimer « réellement ».

Le lendemain, Martel est convaincu que Noémie le trompe et lui demande de filmer l’intérieur de sa résidence pour lui prouver le contraire. Le surlendemain, tout dérape. Yannick Martel croit avoir enfin la preuve que Noémie le trompe lorsqu’il entend une autre voix pendant un appel. Il la menace de mort et lui dit qu’il va détruire sa vie.

Peu de temps après, Noémie décide d’appeler les policiers. Elle convient de les rencontrer vers 18 h 30. Or, elle est trop occupée à cette heure avec ses enfants et déplace l’heure du rendez-vous au lendemain. À 19 h, Martel débarque chez elle. Un couteau tombe de ses poches à son arrivée.

Des jours dans le coma

Noémie tente de le calmer alors qu’elle tient son bébé dans ses bras. Elle réalise que Martel risque de voir qu’elle a discuté avec les policiers en fouillant dans son téléphone. Elle tente alors de l’amadouer pour avoir le temps de supprimer ses messages. Mais Martel fait les 100 pas de façon agitée et la confronte.

Sans qu’elle puisse réagir, Martel la poignarde avec un couteau à tarte à plusieurs reprises. Elle a toujours son bébé dans ses bras. Noémie tombe à la renverse, mais réussit à faire tomber son assaillant et à alerter les voisins.

Une voisine qui fumait une cigarette juste à côté entre dans l’appartement.

J’ai vu Yannick qui se tenait au-dessus d’elle. Elle avait son bébé dans les bras. Puis elle était en position de défense. Il m’a dit que je devais quitter [les lieux]. Il s’est approché de moi, puis il m’a contournée pour aller chercher un couteau de cuisine. Il a repassé devant moi avec le couteau, puis il est allé poignarder [Noémie].

Extrait du témoignage de la voisine lors de l’enquête préliminaire

« Moi puis [Noémie], on s’est regardées. Là, j’ai senti son souffle coupé. Quand il a retiré le couteau, puis qu’il s’est donné un élan pour en donner un deuxième, j’ai pris peur, puis je me suis sauvée. J’ai appelé la police, j’ai barré la porte », a-t-elle témoigné.

Noémie restera dans le coma plusieurs jours, très grièvement blessée. Elle a subi une ablation de la rate et des lacérations très importantes. Elle est restée plusieurs semaines hospitalisée. Le bébé, lui, a été poignardé au dos et aux fesses, mais aucun organe n’a été atteint. Des infections ont toutefois compliqué sa guérison.

Deux ans plus tard, Noémie est toujours traumatisée. Elle a pris la parole mardi devant son bourreau pour décrire son calvaire.

MSarah Beaudry-Leclerc a représenté le ministère public, alors que MElise Pinsonnault a défendu le délinquant.

*Prénom fictif pour protéger l’identité de la victime