(Ottawa) Le Canada fait face à des volumes d’immigration historiques, a rappelé le ministre Marc Miller jeudi en réaction au rapport de la vérificatrice générale sur la longue attente des nouveaux arrivants pour obtenir leur résidence permanente. Il s’est dit « très préoccupé » par ces délais et a reconnu de nouveau l’existence du racisme systémique au sein de son ministère.

« Les délais de traitement des demandes ont des conséquences sur la vie des gens et elles sont importantes », a-t-il reconnu en conférence de presse, quelques heures après la sortie d’un rapport dévastateur de la vérificatrice générale.

Karen Hogan constate que les réfugiés continuent d’attendre près de trois ans avant d’obtenir leur résidence permanente alors que le gouvernement de Justin Trudeau continue de hausser les cibles d’immigration. Le Ministère ne respecte pas le principe du « premier arrivé, premier servi », de sorte que d’anciennes demandes attendent encore plus longtemps d’être traitées.

« Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a depuis longtemps de la difficulté à respecter ses normes de service pour ses programmes de résidence permanente », écrit-elle.

Une situation exacerbée par la fermeture temporaire de ses bureaux de traitement de demandes au Canada et à l’étranger au plus fort de la pandémie de COVID-19, ce qui n’a pas empêché le gouvernement de continuer à hausser les cibles d’immigration chaque année depuis 2018.

Le ministre fédéral de l’Immigration a défendu cette approche. « Les cibles qu’on se fixe chaque année de façon statutaire le 1er novembre, c’est justement pour planifier les ressources nécessaires pour accueillir les gens, a-t-il répondu. Réduire les cibles, c’est aussi réduire les ressources des gens qui viendraient au Canada. »

De toutes les catégories d’immigrants, ce sont les réfugiés qui attendent le plus longtemps, jusqu’à 30 mois, avant d’obtenir une réponse. Le délai de traitement s’est amélioré pour les immigrants économiques et ceux du regroupement familial. En tout, 99 000 demandes en vertu des programmes destinés aux réfugiés étaient toujours en attente de traitement à la fin de 2022.

« On fait face à des volumes qui sont historiques, a-t-il rappelé. […] Mais on a des ressources qui sont quand même limitées. Ça vient avec la coordination avec les provinces, évidemment, qui ont leur mot à dire, surtout le Québec. »

Il note que l’État québécois a fait plus que sa part pour accueillir les demandeurs d’asile du chemin Roxham, mais ajoute qu’il devrait en faire davantage pour les réfugiés d’Amérique du Sud et d’Haïti. Reste que le Québec a sa part de responsabilité dans les délais de traitement ; seulement 30 % des demandes du programme de travailleurs qualifiés respectaient les normes de services du fédéral, selon la vérificatrice générale.

Plus de demandes que d’admissions

Dans son rapport, Karen Hogan remarque également que le ministère fédéral de l’Immigration reçoit plus de demandes de réfugiés qu’il ne peut en accepter. Par exemple, le nombre de demandes présentées en vertu du programme de parrainage privé de réfugiés était trois fois plus élevé au début de 2022 que le nombre de personnes que le Ministère pouvait admettre, sans compter 20 000 nouvelles demandes reçues. Sa capacité pour réduire cet arriéré est donc « limitée », note la vérificatrice générale.

PHOTO JUSTIN TANG, LA PRESSE CANADIENNE

La vérificatrice générale du Canada, Karen Hogan, jeudi

Cet arriéré dépend du pays d’origine du demandeur. Par exemple, plus de la moitié des demandes de citoyens somaliens ou congolais étaient en attente contre un tiers des demandes de citoyens syriens. La Somalie, la République démocratique du Congo et la Syrie sont les trois pays d’où proviennent le plus grand nombre de demandes présentées en vertu du programme de réfugiés parrainés par le gouvernement.

Même si les bureaux du ministère de l’Immigration en Afrique subsaharienne ont « un manque chronique de ressources », ils continuent de se voir attribuer « des volumes de demandes parmi les plus élevées ».

Karen Hogan recommande au Ministère de prendre des « mesures immédiates » pour remédier au problème de délai de traitement. Elle l’appelle également à se doter de nouvelles normes de services « réalistes et réalisables » pour éviter de continuer d’accepter de nouvelles demandes d’immigration quand leur nombre excède déjà sa capacité de traitement.