(Ottawa) Préoccupés « que le système de justice pénale de Justin Trudeau permette à des monstres comme Luka Magnotta et Paul Bernardo d’être libérés des prisons à sécurité maximale dans lesquelles ils devraient être enfermés », des élus réclament une réunion d’urgence d’un comité parlementaire.

« Il est désormais évident que, sous le gouvernement de Justin Trudeau, il est normal de libérer les tueurs les plus dangereux et les plus sadiques des prisons à sécurité maximale pour leur permettre de jouir des libertés et du confort d’un établissement à sécurité moyenne », avancent les cinq députés – quatre conservateurs et une bloquiste – dans leur lettre.

« Ces meurtriers sadiques jouissent de la liberté et du luxe des prisons à sécurité réduite, alors que les familles de leurs victimes et les communautés qu’ils ont terrorisées restent irrémédiablement marquées par leurs crimes », poursuivent les élus en réclamant une rencontre « d’urgence » du Comité permanent de la sécurité publique et nationale de la Chambre des communes.

On a appris plus tôt cette semaine dans les pages du Toronto Sun que Luka Magnotta, qui a tué et démembré un étudiant chinois à Montréal en 2012, avait été transféré d’un établissement à sécurité maximale à celui de La Macaza, dans les Hautes-Laurentides, à sécurité moyenne.

Il y a donc rejoint le tueur en série Paul Bernardo, dont le transfert avait suscité l’incompréhension et plongé le gouvernement Trudeau dans l’embarras à l’été 2023.

« [Luka] Magnotta continue de purger une peine d’une durée indéterminée dans un établissement sécurisé. Notre objectif fondamental est d’assurer la sécurité du public, et c’est exactement ce que nous continuons de faire », a exposé dans un courriel Kevin Antonucci, porte-parole de Service correctionnel du Canada (SCC).

« Dans ce cas-ci, [Luka] Magnotta a fait l’objet d’un transfèrement en 2022 vers un établissement à sécurité moyenne, où il y a un périmètre bien défini, des clôtures hautes, une surveillance étroite en tout temps et des agents armés qui font des patrouilles », a-t-il ajouté dans la même déclaration.

« Il ne faut pas charrier »

Les députés du comité souhaitent entendre les témoignages « de ministres libéraux, de représentants du gouvernement, de l’agence correctionnelle ainsi que de tous les autres témoins jugés pertinents pour le comité ».

Si la députée bloquiste Kristina Michaud a appuyé la démarche, c’est surtout pour « remettre les pendules à l’heure ». Elle se souvient ne « pas avoir apprécié » que les conservateurs aient exploité le transfèrement de Paul Bernardo à des fins politiques et « semer la crainte » au sein de la population.

« C’est important pour moi de démontrer que ce n’est pas aux parlementaires de décider, ou de s’ingérer dans le processus de transfèrement de détenus. Je le vois comme une opportunité de comprendre la décision et de comprendre les processus, mais aussi de rassurer la population », argue-t-elle en entrevue.

« J’ai entendu que c’était comme un forfait tout inclus, que les gens incarcérés étaient plus confortables que la majorité des Canadiens. Il ne faut pas charrier non plus », ajoute celle qui soutient ne pas « endosser à 100 % ce qui est écrit dans la lettre ».

Bisbille autour d’une patinoire

En début de semaine, le député conservateur Frank Caputo s’est fendu d’une vidéo d’environ sept minutes, sur fond de musique anxiogène, pour raconter sa visite à l’établissement de La Macaza. « Je me suis retrouvé en face de Paul Bernardo. Vous ne croirez pas dans quelles conditions vit ce gars », lance-t-il en ouverture de la vidéo partagée sur les médias sociaux.

PHOTO ADRIAN WYLD, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

En début de semaine, le député conservateur Frank Caputo s’est fendu d’une vidéo d’environ sept minutes, sur fond de musique anxiogène, pour raconter sa visite à l’établissement de La Macaza.

La principale raison de son indignation : la présence d’une patinoire de hockey sur le site de cet établissement, qui s’apparente selon lui davantage à un « campus universitaire » qu’à une institution carcérale. « Les détenus peuvent prendre leur patin et jouer au hockey ; il y a des filets de hockey et tout. S’ils veulent y aller le soir, il y a des lumières », décrit l’élu de la Colombie-Britannique.

La vidéo a jusqu’à présent été visionnée plus de 520 000 fois.

Dans l’espoir de faire grimper le compteur, sa collègue ontarienne Michelle Ferreri a invité l’animateur Joe Rogan à s’y intéresser « s’il veut en apprendre davantage sur le Canada », avec copie conforme à Elon Musk et au psychologue controversé Jordan Peterson sur le réseau X.

À des fins de précision, Service correctionnel du Canada a souligné par courriel qu’« à l’heure actuelle, il n’y a aucune patinoire de hockey ni aucun terrain de tennis fonctionnels utilisés par les détenus à l’Établissement de La Macaza », et que « bien qu’il y ait des bandes de patinoire en place à l’établissement, il n’y a pas eu de glace au cours des deux derniers hivers ».

« Les activités récréatives offertes aux délinquants permettent de rendre les établissements plus sécuritaires pour les personnes qui y vivent et y travaillent, en veillant à ce que les délinquants occupent leur temps de façon productive, contrôlée et saine. Le matériel et l’infrastructure, comme la plupart des autres aspects d’un milieu correctionnel, sont de nature plus rudimentaire », a-t-on aussi expliqué.

Un cadre « laxiste », estiment les députés

Le transfèrement de meurtriers comme Luka Magnotta et Paul Bernardo est, selon les élus qui ont réclamé une rencontre de comité, le résultat de la Loi modifiant la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et une autre loi (projet de loi C-83), qui a obtenu la sanction royale en juin 2019.

Celle-ci prévoit que SCC « doit s’assurer, dans la mesure du possible, que le pénitencier dans lequel est incarcéré le détenu constitue un milieu où seules existent les restrictions les moins privatives de liberté pour celui-ci », en tenant compte d’une série de facteurs.