Il fait chaud, mais on se sent tout à fait bien et on est du genre « fait fort » ? Si l’on est âgé, ça ne change rien. Ce qu’il faut, c’est mesurer combien il fait chez soi. Le nombre magique : 26 °C à maintenir à l’intérieur. Au-dessus de cela, il faut sérieusement envisager de trouver un endroit climatisé.

Ce qu’il faut savoir

En 2020, 585 personnes sont mortes à cause de la chaleur extrême en Colombie-Britannique.

La chaleur en 2022 a fait plus de 60 000 morts en Europe, selon une étude publiée il y a quelques semaines dans Nature Medicine par des chercheurs français et de Barcelone.

Les autorités d’ici doivent se préparer et s’assurer que toute personne âgée ou vulnérable a accès à de la climatisation chez elle ou près de chez elle, plaide une équipe de chercheurs canadiens. Non, ce n’est pas écolo, mais cela sauve des vies, insistent-ils.

C’est là un des messages clés que Glen Kenny, titulaire de la chaire de recherche de l’Université d’Ottawa en physiologie environnementale, veut que l’on retienne de l’étude qu’il vient de faire paraître sur les effets de la chaleur – et de la climatisation – sur les personnes âgées.

Le professeur Kenny et son équipe ont soumis 40 adultes âgés de 64 à 79 ans à une simulation de canicule de 9 heures à 37 °C. Ils ont ensuite été divisés en deux groupes, l’un bénéficiant d’un repos de deux heures dans une pièce climatisée, l’autre, non.

Résultat : ceux qui se sont trouvés dans une pièce climatisée pendant deux heures avaient de meilleures fonctions cardiovasculaires que les autres, dont l’état psychologique s’était aussi détérioré.

Les chercheurs ont constaté qu’un accès à un endroit climatisé pour quelques heures « réussit à réduire la température corporelle et à limiter les effets délétères sur le cœur ».

Cependant, cet effet protecteur est temporaire : une fois qu’elle n’est plus dans un endroit climatisé, la personne âgée est de nouveau rapidement fragilisée par la chaleur.

Il ne faut pas penser pour autant que ces refuges climatisés soient inutiles, au contraire. Ils sont indispensables, souligne le professeur Kenny en entrevue, « mais les personnes âgées qui en repartent doivent être avisées qu’une fois de retour chez elles, même si elles se sentent davantage rafraîchies et revigorées, ça n’est pas pour autant le temps de jardiner et de reprendre ses activités habituelles. Elles demeurent vulnérables à la chaleur ».

L’étude de M. Kenny et de son équipe note que selon la littérature sur le sujet, les personnes âgées qui se rendent dans des endroits climatisés courent 66 % moins de risques de mourir de la chaleur.

L’âge, ce facteur clé

En vieillissant, explique M. Kenny, la réalité est là, implacable : les mécanismes de défense du corps sont moins capables de nous protéger de la chaleur. On produira par exemple moins de sueur et notre tension artérielle sera davantage affectée par les hautes températures.

Personne n’aime penser qu’il est vulnérable. Une personne âgée qui n’est pas malade pensera que c’est le voisin qui est en danger et pas lui, puisqu’il est un ancien joueur de football.

Glen Kenny, titulaire de la chaire de recherche de l’Université d’Ottawa en physiologie environnementale

Mais lors de grosses chaleurs, insiste cet expert, un bon état de santé ne suffit pas à nous protéger. C’est l’âge au compteur qui est crucial.

On évite souvent de déranger les autres, mais ici, il n’est pas question de cela. Pas question non plus de fonctions cognitives optimales ou pas.

La réalité, souligne le professeur Kenny, c’est que les personnes âgées sont plus accablées par la chaleur qu’elles le pensent. Et surtout, elles ignorent que leur état risque davantage de se dégrader souvent d’un coup. Ça va pendant quelques heures, et tout d’un coup, le simple fait d’aller à la salle de bains est soudainement trop exigeant : « on peut se sentir étourdi, tomber et se fracturer une hanche ».

Les personnes âgées qui meurent lors de canicules ne sont donc sûrement pas toutes des personnes seules, isolées ou atteintes de démence. Parmi celles-ci se trouvent sans doute aussi des gens normalement très en forme qui croyaient bien supporter le temps.

« Quand un proche âgé vous dit qu’il n’a pas chaud, que tout va bien et que vous ne devez pas vous inquiéter, ne vous contentez pas de cette réponse. Demandez-lui de vous dire précisément ce qu’indique le thermostat », insiste M. Kenny, qui relève aussi que les ventilateurs n’offrent pas une réelle protection aux personnes âgées.

Lors de canicules, que faire si une personne âgée n’est pas en mesure de sortir de chez elle ou refuse net de le faire ? Si tel est le cas, M. Kenny répond qu’il faut alors prévenir les autorités publiques de la situation.

La Colombie-Britannique, où la climatisation était beaucoup moins répandue qu’au Québec (les étés y étaient historiquement moins chauds), est aujourd’hui plus consciente de l’importance de protéger les personnes vulnérables. Les autorités viennent d’annoncer la distribution de 8000 climatiseurs aux personnes à faibles revenus et vulnérables à la chaleur.

Consultez l’étude parue dans Environmental Health Perspectives (en anglais)