(Québec) Devant les fermetures en série, le gouvernement Legault subventionnera les services et soins de santé dans les petites résidences privées pour aînés (RPA) pour éviter que les propriétaires refilent la facture aux résidants.

Ce qu’il faut savoir

Au moins 500 RPA ont fermé leurs portes depuis les cinq dernières années. En 2023, 2700 places d’hébergement ont été perdues à la suite de changement de vocation de résidences.

L’augmentation des taux d’intérêt, la pénurie de main-d’œuvre en santé et l’inflation ont fragilisé les plus petites RPA qui offrent des soins de santé. Leur modèle d’affaires est devenu difficilement tenable.

Le nouveau programme de Québec vise à donner de l’oxygène aux RPA de 30 unités et moins qui offrent des soins de santé. On estime qu’il touchera 600 résidences à travers la province et 2100 résidants.

Le nouveau programme déployé par le gouvernement prévoit l’implantation d’une allocation personnalisée par résidant qui sera versée directement à la RPA. L’évaluation de la somme se fera en vertu d’une nouvelle grille tarifaire uniformisée pour les services, une demande de longue date de l’industrie.

« Les gens entrent en RPA, ils sont capables de payer le gîte, le couvert. Lorsqu’il arrive un épisode de maladie ou de perte d’autonomie, ils veulent demeurer là, mais malheureusement, ce n’est pas tout le monde qui a les moyens de se payer les soins. Le gouvernement vient reconnaître cette portion-là et c’est extrêmement important », a expliqué la ministre Sonia Bélanger, mardi.

Des représentants du Regroupement québécois des résidences pour aînés et du Réseau québécois des OSBL d’habitation étaient à ses côtés.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE

La ministre déléguée à la Santé et ministre responsable des Aînés, Sonia Bélanger

La ministre déléguée à la Santé et ministre responsable des Aînés avait télégraphié ses intentions la semaine dernière, en marge du caucus de la Coalition avenir Québec. Une nouvelle compilation de La Presse faisait état de la perte de 2700 places d’hébergement en 2023 en raison de changement de vocation de RPA.

Le nouveau programme gouvernemental touchera quelque 600 RPA. La ministre Sonia Bélanger veut donner de l’oxygène aux plus petites résidences, celles de 30 unités et moins qui offrent des soins et services de santé aux aînés en perte d’autonomie. Dans le jargon, il s’agit des RPA de catégories 3 et 4.

Des 500 RPA qui ont fermé au cours des cinq dernières années, 80 % étaient des résidences de 30 unités et moins, a fait valoir mardi le ministère de la Santé et des Services sociaux.

Avec sa nouvelle mesure, Sonia Bélanger souhaite mettre fin aux fermetures en série en stabilisant le financement des résidences. On espère aussi favoriser le maintien à domicile de ces aînés et éviter leur transfert en CHSLD. Offrir davantage de soins en RPA pourrait aussi permettre un retour plus rapide de l’usager chez lui après un séjour à l’hôpital, a énuméré la ministre.

Il faut comprendre que les soins et services de santé sont déjà en partie subventionnés par le gouvernement. Or, en raison de l’explosion des coûts de la main-d’œuvre, par exemple, dans un contexte de pénurie, et du vieillissement de la population, le modèle d’affaires des petites RPA qui offrent des soins est devenu au fil des années difficilement tenable. La facture pouvait alors être refilée à l’usager.

Souvent, l’aîné a besoin de plus de soins qu’il n’en reçoit. Avec l’aide gouvernementale, Québec espère que l’offre sera augmentée pour suivre les besoins des résidants. L’allocation personnalisée pourra « réduire le fardeau financier » des résidants et offrir davantage de stabilité aux propriétaires. Comme l’indique le tableau, les sommes pour les services de santé sont bonifiées à coût nul pour le résidant.

En pratique, l’état de santé d’un aîné sera évalué par le CISSS ou le CIUSSS du territoire. Un « plan de services » sera établi en fonction de la nouvelle grille tarifaire nationale. Par exemple, la subvention gouvernementale pour un bain ou pour la distribution de médicaments sera la même partout au Québec. En fonction des besoins de l’usager, une « allocation personnalisée » sera versée directement à la RPA.

Le déploiement est prévu d’ici juin prochain.

Pas un chèque en blanc, dit Bélanger

La somme est versée à la résidence et non directement à l’usager, qui peut continuer de bénéficier du crédit d’impôt pour le maintien à domicile des personnes aînées. La ministre prévient les RPA qu’il ne s’agit pas d’un « chèque en blanc » et que des mécanismes sont en place pour s’assurer que l’argent se traduise par l’augmentation des soins à l’usager.

« [Il y aura une équipe] de 15, 16 personnes qui sera déployée là où il y a des RPA de catégories 3 et 4 pour soutenir les équipes CLSC et […] les infirmières en RPA », a souligné Mme Bélanger. Elle rappelle par ailleurs que l’usager doit consentir à ce que l’allocation personnalisée soit versée à la RPA. « L’aîné ou le proche va l’autoriser et il y aura des évaluations annuelles », ajoute-t-elle.

Dans le dernier budget, des sommes de 200 millions sur cinq ans ont été réservées pour procéder aux changements, dont 42,6 millions cette année.

L’allocation moyenne annuelle par résidant est estimée à 20 000 $. Québec évalue que quelque 2100 personnes en perte d’autonomie seront admissibles au programme.

On écrit dans le plan budgétaire 2023-2024 que la mesure permettra notamment « le financement de plus de 1 million d’heures de services en RPA par année pour les résidants en perte d’autonomie ».

Il est déjà acquis que ces sommes seront insuffisantes pour couvrir l’ensemble des besoins. Des sommes supplémentaires pourraient être engagées dans les prochaines années.