(Ottawa) Alors que les évènements météorologiques extrêmes comme les tornades et les derechos se produisent de plus en plus fréquemment au Canada, des experts réclament que les provinces ajoutent des mesures aux codes de construction pour mieux protéger les maisons du pays.

Les chercheurs associés au Northern Tornadoes Project (NTP) de l’Université Western, en Ontario, rappellent qu’installer des tirants pour ouragans, soit des dispositifs en acier qui permettent de relier la toiture au reste de la maison, coûte environ 200 $ par maison. Selon eux, ils devraient être obligatoires dans tous les codes de construction du pays.

« On pense que si les tirants pour ouragans étaient obligatoires, cela ferait en sorte que les maisons seraient protégées de 95 % à 99 % de voir leur toit être arraché par une tornade typique au Canada », a expliqué Connell Miller, qui est chercheur associé au NTP.

Actuellement, aucune province n’oblige l’installation de tirants pour ouragans ou d’autres dispositifs similaires dans son code de construction.

Le 13 juillet, deux tornades ont balayé le sud de la région d’Ottawa, endommageant plus de 100 maisons dans le quartier de Barrhaven. Le même jour, au Québec, une tornade survenue à Saint-Thomas, dans Lanaudière, a causé des dommages à deux granges et une maison.

Jeudi soir, une autre tornade a touché terre à Metcalfe, à environ 30 kilomètres au sud-est d’Ottawa, lors d’un orage violent.

Dans tous ces cas, les dommages des tornades ont surtout affecté la toiture des maisons. Selon les experts, de tels dommages pourraient facilement être évités en adaptant mieux les bâtiments aux conditions météorologiques extrêmes.

« On vient de voir ces très grosses tempêtes — pas juste les tornades — et on croit qu’à un coût minime, on pourrait bâtir des maisons mieux conçues pour résister aux évènements extrêmes », a fait valoir le directeur général de l’Institut de prévention des sinistres catastrophiques, Glenn McGillivray.

À son avis, l’ajout de mesures comme un revêtement plus épais, des tirants plus longs et rapprochés pour les toits et des tirants pour ouragans empêcheraient la plupart des dommages aux maisons lors de tempêtes et de tornades désignées jusqu’à la force EF-2, soit environ 220 km/h.

Plus d’évènements

Le NTP a répertorié 117 tornades tant en 2021 qu’en 2022, ce qui en faisait des records au Canada.

Lors de ces deux années, un total de 58 tornades ont été classées comme étant de niveau EF-2, ce qui est déjà relativement fort, mais aucune n’a atteint les critères du palier suivant.

Les experts du NTP ont mené 447 enquêtes sur des phénomènes météorologiques violents l’an dernier. Ils se sont notamment penchés sur le derecho qui a parcouru 1000 kilomètres à travers des régions très peuplées du Québec et de l’Ontario, en mai 2022, tuant 11 personnes et causant plus d’un milliard de dollars en pertes assurées.

Selon M. McGillivray, les évènements violents survenaient habituellement à quelques mois d’intervalle, mais ils se produisent maintenant à une fréquence beaucoup plus élevée, à un point où les ressources sont parfois débordées parce que les incidents se chevauchent.

Et en pleine crise du logement, les dommages causés aux maisons par les tempêtes entraînent des conséquences encore plus graves.

« Chaque année, des centaines, voire des milliers, de maisons sont rendues inhabitables en raison de tempêtes. On ne peut pas se permettre ça en pleine crise du logement », a souligné M. McGillivray.

« Donc, si nous préparons mieux nos maisons à résister aux conditions extrêmes, ça nous permettra d’être plus préventifs que réactifs. »

De la résistance et des pionniers

De nombreux promoteurs s’opposent toutefois à l’idée de modifier les codes de construction pour y inclure des exigences plus strictes en matière de prévention des évènements extrêmes, a indiqué M. McGillivray.

Une partie de leur résistance s’explique par le coût supplémentaire, mais aussi parce que les promoteurs devraient former des ouvriers sur des protocoles mis à jour et aller « en dehors des normes de construction utilisées depuis de nombreuses décennies ».

Malgré tout, certains constructeurs, comme Doug Tarry Homes, vont déjà au-delà des exigences des codes de construction en incorporant des tirants pour ouragans et des vis à treillis dans leurs projets.

Le président de l’entreprise, Doug Tarry, a mentionné que si les liens anti-ouragan sont relativement peu coûteux, la formation de la main-d’œuvre impliquée dans l’installation de ces composants est plus lourde à porter pour les constructeurs.

En conséquence, a-t-il noté, l’installation de liens anti-ouragan ou d’éléments similaires ajoute environ 1000 $ aux dépenses liées au projet de construction.

Mais même à ce coût, il estime que le jeu en vaut la chandelle et il pousse le reste de son industrie à s’adapter à la réalité des changements climatiques.