La Laiterie Chalifoux de Sorel-Tracy, où l’on fabrique quelque 250 produits laitiers et véganes différents sous la marque Maison Riviera, est en activité depuis 103 ans, mais a entrepris il y a six mois un nouveau cycle de développement avec la nomination d’Émilie Laurin comme nouvelle directrice générale du groupe. « On est le plus gros des petits joueurs ou le plus petit des gros », se plaît à dire la spécialiste de la transformation alimentaire qui a été recrutée pour poursuivre la tradition d’innovation du groupe laitier.

La laiterie familiale qui a été dirigée durant 100 ans par quatre générations de Chalifoux a été acquise en 2021 par la coopérative française Alsace Lait, qui était déjà actionnaire de l’entreprise depuis 2015, lorsque Maison Riviera a décidé de se lancer dans la fabrication de yogourts.

Alain Chalifoux, le PDG de la Laiterie Chalifoux, a alors cédé 40 % des actions de l’entreprise pour pouvoir équiper la laiterie des équipements nécessaires à la fabrication de yogourts laitiers et véganes.

« L’innovation a toujours été la force de Maison Riviera, qui produisait jusque-là du lait, du beurre et des fromages. En 2015, ils ont mis sur le marché leurs yogourts ultrafrais dans de petits pots de verre. Ils développaient des produits de niche, différenciés, comme la crème fraîche », observe Émilie Laurin, qui a rejoint le groupe de transformation laitière le 7 mars dernier à titre de directrice générale de Maison Riviera.

La coopérative laitière Alsace Lait s’est associée à Bpifrance, banque publique d’investissement française, pour racheter la totalité des actions de Maison Riviera en 2021, et a recruté Émilie Laurin afin qu’elle mette en place une vision de développement qui capitalise sur l’innovation.

On doit composer avec de grands groupes comme Danone, Lactalis, Agropur ou Saputo, alors on doit se démarquer en innovant. On l’a fait en lançant un fromage à la crème qui est venu concurrencer le Philadelphia qui accapare plus de 90 % du marché.

Émilie Laurin, directrice générale de Maison Riviera

« On offre plus de 250 produits différents avec des volumes qui varient de 2300 à 25 000 kg par année. Les gros transformateurs ne peuvent faire ça, on est plus agile, c’est dans notre ADN », expose la directrice générale.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, LA PRESSE

Titulaire d’un doctorat en sciences de la transformation des aliments, Émilie Laurin est arrivée en poste en mars 2023.

C’est en raison de ses connaissances du secteur laitier et de la gestion des grandes équipes qu’Émilie Laurin a été choisie par Alsace Lait pour prendre la direction de Maison Riviera.

Titulaire d’un doctorat en sciences de la transformation des aliments, Émilie Laurin s’est spécialisée dans les moyens de limiter les pertes durant le transport des denrées périssables, de la ferme à la distribution.

Elle a travaillé pour une entreprise en démarrage de Washington à développer des sous-produits d’algues pour produire des oméga-3 avant de se joindre à Ocean Nutrition à Halifax, puis elle s’est retrouvée chez Ultima Foods, où elle a joué un rôle important dans le lancement de la marque de yogourts, avant de devenir vice-présidente à l’innovation et au développement de produits chez Agropur.

Elle était vice-présidente à l’innovation chez Nature’s Touch, le plus gros producteur de fruits congelés de marques privées en Amérique du Nord, lorsque Alsace Lait est allée la chercher.

Plus gros producteur de yogourts véganes au Canada

Maison Riviera transforme annuellement 40 millions de litres de lait à son usine de Sorel-Tracy, dont la moitié est destinée à la fabrication sous contrat des fromages Bel (Babybel), alors que l’autre moitié est transformée à 50 % en différents fromages Maison Riviera (cheddar, parmesan, fromage en grains…) et à 50 % en yogourts Riviera.

« On produit des yogourts laitiers, mais on fabrique aussi des yogourts véganes qui représentent 50 % du volume total de notre division yogourts. On est le plus gros producteur de yogourts véganes au Canada », précise Émilie Laurin.

Au cours des six derniers mois, la nouvelle directrice générale a fait le tour des activités du groupe et a pris le temps de formuler le plan d’action des cinq prochaines années qui visera à optimiser les opérations, le niveau de service aux clients, l’automatisation de la production et la solidification des équipes en place.

« On vient d’investir 3 millions dans une nouvelle trancheuse à fromage, une automatisation qui va nous permettre de dégager des employés pour réaliser des tâches à valeur ajoutée.

« On va investir l’an prochain et en 2025, avec des partenaires comme Investissement Québec, 12 millions supplémentaires dans l’automatisation et la numérisation de nos lignes de production, pour faire face à la pénurie de main-d’œuvre. Il faut capitaliser sur l’innovation », rappelle Émilie Laurin.

Coût des intrants à la hausse

Au chapitre de la distribution, Maison Riviera veut notamment harmoniser ses pratiques ; actuellement, elle doit livrer directement ses produits dans chacun des magasins Metro, alors qu’elle livre aux entrepôts de Sobey’s et qu’elle fait affaire avec des distributeurs pour rejoindre ses clients dans les Maritimes et livrer ses yogourts véganes dans l’ouest du pays.

En cette ère de folle inflation dans le secteur de l’alimentation, difficile de ne pas demander à la directrice générale de Maison Riviera si l’industrie de la transformation n’est pas en partie responsable de la hausse des prix du panier d’épicerie.

« J’aurais beaucoup à dire sur le sujet, mais il faut savoir qu’on est aussi victime de la hausse des coûts. Qu’il s’agisse de la main-d’œuvre, des frais de bannières, des prix du lait qui sont fixés en fonction des quotas, des coûts de transport et des surtaxes sur les prix des carburants, on subit les hausses nous aussi.

« Nos prix ont augmenté de 5 à 7 % au cours de la dernière année et on travaille déjà à préparer nos évaluations en vue des augmentations que l’on va présenter à nos clients en février prochain, c’est beaucoup de travail », convient la directrice générale de Maison Riviera.