Vickie Joseph a été désignée la semaine dernière nouvelle présidente du conseil d’administration de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM). La cofondatrice du Groupe 3737 et de V Kosmetik entend bien mettre en priorité au cours des deux prochaines années la diversité et l’inclusion dans son rôle au sein de l’organisation. « La Chambre de commerce veut s’ouvrir à la diversité, et la nomination d’une femme noire comme présidente confirme cette volonté », souligne l’entrepreneure.

Membre du conseil d’administration de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain depuis six ans, Vickie Joseph siégeait également au comité exécutif de l’organisation et à celui des finances et d’audit.

« Lorsque Michel Leblanc m’a approchée à l’époque pour que je me joigne au conseil d’administration, il m’a dit que la Chambre de commerce voulait s’ouvrir à la diversité. Si je suis aujourd’hui présidente, c’est un signe que l’inclusion, ça fonctionne, que j’ai une influence réelle », constate Vickie Joseph.

Avec son mari, Frantz Saintellemy, entrepreneur techno qui a fait sa marque dans l’industrie des semiconducteurs et qui est aujourd’hui président et chef des opérations du LeddarTech, Vickie Joseph a cofondé il y a 10 ans le Groupe 3737, un incubateur d’entreprises de la diversité localisé au 3737, boulevard Crémazie, dans le quartier Saint-Michel.

« On a acheté l’édifice et on a beaucoup investi pour que le Groupe 3737 connaisse une croissance exponentielle, en épaulant des entrepreneurs issus de la diversité. Au départ, c’étaient principalement des Noirs, mais aujourd’hui, ce sont des gens qui viennent de partout pour profiter de nos locaux et de nos expertises pour lancer leur entreprise », explique la cofondatrice.

En plus de 10 ans d’existence, le Groupe 3737 a accompagné plus de 500 PME et assisté quelque 2000 entrepreneurs de la diversité ethnoculturelle.

Une trentaine de PME profitent présentement des locaux à Montréal, mais le Groupe 3737 a maintenant sa propre existence et a pris de l’expansion avec une douzaine de bureaux au Canada.

« Frantz et moi avons voulu redonner aux communautés de la diversité. Aujourd’hui, on ne s’occupe plus des activités quotidiennes du Groupe 3737, il a son propre directeur général et ses employés qui épaulent les entrepreneurs de partout au pays », souligne Vickie Joseph.

Née à Montréal, dans le quartier Saint-Michel, Vickie Joseph considère qu’elle s’est toujours sentie intégrée à la vie montréalaise et québécoise, mais elle a vécu un évènement discriminatoire qui l’a convaincue de se lancer en affaires.

« J’ai étudié en design de mode à l’Académie internationale de mode et de design de Montréal. Quand j’ai eu mon diplôme, j’ai travaillé comme représentante exécutive de plusieurs grandes compagnies pour apprendre les rouages de l’industrie.

« Lorsque je suis devenue enceinte de mon premier enfant et que j’ai demandé mon congé de maternité, on m’a dit que je n’avais pas le profil voulu et que les clients voulaient avoir une représentante qui était blanche. Ça m’a complètement déstabilisée », relate l’entrepreneure.

De la mode aux cosmétiques

C’est la raison qui l’a poussée en 2008 à créer sa propre entreprise de vêtements pour dames, Nu.I by Vickie, et d’ouvrir deux boutiques à Laval et à Montréal.

« Les affaires allaient bien jusqu’en 2014, lorsque les lois régissant le commerce de vêtements ont changé et qu’on a assisté à un raz-de-marée d’importations de manufacturiers asiatiques. J’ai alors décidé de lancer ma propre ligne de cosmétiques pour femmes ethnoculturelles », explique Vickie Joseph.

Après deux ans de préparation, les premiers produits de V Kosmetik ont fait leur apparition dans plus de 150 pharmacies au Québec en 2017.

Il n’y avait pas de représentativité de la diversité pour les produits cosmétiques sur les étagères des magasins. On a créé une gamme de produits pour toutes les teintes de peau. Aujourd’hui, on a plus de 150 produits différents et nos ventes à l’international sont rendues plus importantes que nos ventes au Québec.

Vickie Joseph

« En Afrique, nos produits sont très en demande parce qu’ils sont fabriqués au Canada avec des ingrédients de qualité », précise Vickie Joseph.

Parallèlement à ses activités d’affaires, l’entrepreneure poursuit ses interventions pour permettre aux femmes issues de l’immigration de prendre leur place dans la société. Chaque mois, Vickie Joseph organise des conférences maquillage et affaires qui sont destinées aux femmes racisées.

Pour elle, c’est une façon de participer à leur promotion en leur présentant des conseils pratiques qui lui ont été utiles dans sa carrière.

Vickie Joseph prévoit lancer cette année une nouvelle fondation, V Cares, pour soutenir les femmes seules, cheffes de famille monoparentale qui sont dans le besoin afin de leur redonner une voix et qu’elles puissent contribuer à leur tour à la société, un genre de Groupe 3737 pour les femmes.

Vickie Joseph compte bien aussi profiter de son nouveau rôle de présidente du conseil de la CCMM pour faire la promotion des gens issus de la diversité.

« C’est sûr qu’il y a plein de dossiers mobilisants à la Chambre de commerce, comme la transformation numérique, l’environnement, les problèmes de main-d’œuvre ou la relance du centre-ville.

« On a de grands dossiers devant nous, mais l’écosystème et l’économie du Québec ont besoin de la diversité, et ça fait partie de mon ADN de vouloir une meilleure représentation de gens de toutes les cultures », estime Vickie Joseph.

La nouvelle présidente souhaite notamment que les grandes entreprises qui participent aux évènements de la Chambre de commerce développent le réflexe de déléguer des gens des communautés ethnoculturelles parmi leurs représentants, afin que ces derniers aient justement une meilleure représentativité.