Ils doivent trancher, chaque jour. Prendre des décisions parfois simples, parfois compliquées, dont les impacts peuvent être énormes demain ou dans dix ans.

Ils doivent être à l’écoute, tantôt négociateurs, tantôt diplomates, tantôt autoritaires, toujours convaincus et convaincants. La plupart ne comptent pas leurs heures et sont souvent critiqués, notamment pour leur forte rémunération.

De qui je parle ? De nos décideurs, du milieu des affaires et d’ailleurs, à qui je veux rendre hommage aujourd’hui.

Car après tout, notre société est le reflet de ces milliers de décisions hebdomadaires, grandes et petites, qui font aujourd’hui de Montréal, du Québec et du Canada une société, certes imparfaite, mais somme toute équilibrée, prospère et enviée partout dans le monde.

Jeudi soir dernier, c’est un peu beaucoup un hommage qui était rendu à nos décideurs, en quelque sorte, lors du 200anniversaire de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Plus de 850 personnes étaient rassemblées à la gare Windsor pour souligner les faits d’armes de la Chambre. J’y étais.

« L’objectif est de célébrer exactement cela. C’est plusieurs générations de gens d’affaires qui ont pris des décisions, à travers la Chambre, et qui veulent que ça fonctionne. Si Montréal a repris sa lancée ces dernières années, c’est grâce à cette dynamique », me dit Michel Leblanc, président de la Chambre de commerce depuis 2009.

Imaginez, la Chambre est née en 1822 (alors Committee of Trade), soit avant la rébellion des patriotes de 1837, avant la fondation du Canada en 1867, avant le krach de 1929, avant la guerre mondiale de 1939 et avant l’accord de libre-échange de 1987.

La Chambre est à l’origine de la création du port de Montréal, en 1857, et de l’École des hautes études commerciales (HEC Montréal), en 1907, entre autres. Quand même !

Il régnait une ambiance de retrouvailles post-COVID-19 à cette soirée chic. Plusieurs décideurs ne s’étaient pas croisés en personne depuis deux ans.

Tiens, voilà Andrew Molson, de la famille qui a fondé la brasserie Molson, en 1786, et qui est l’un des principaux propriétaires du Canadien de Montréal. La famille Molson est l’une des rares encore en affaires après sept générations.

Autres PDG d’entreprises familiales présents : Pierre Pomerleau, de l’entreprise de construction du même nom, et Laurence Vincent, de Prével.

Tiens, voilà Pierre Karl Péladeau, de Québecor, qui se fraie un chemin à travers la foule. « Bonjour Monsieur Vailles. J’aime bien ce que vous écrivez », me dit-il. Bon, bon, bon…

Parmi les autres gens d’affaires se trouvaient Guy Cormier, du Mouvement Desjardins, Rémi Racine, de Behaviour Interactive, et Janie Béïque, du Fonds de solidarité FTQ.

Le pouvoir politique était aussi bien représenté, qu’on pense au superministre Pierre Fitzgibbon, à la mairesse Valérie Plante ou même au ministre fédéral Francois-Philippe Champagne, parti d’Ottawa en fin d’après-midi, après l’Énoncé économique de Chrystia Freeland.

Les retrouvailles faisaient du bien. Plusieurs ne se gênaient pas pour se lever, entre les plats, afin de jaser affaires ou discuter simplement avec une connaissance plus loin, aidés par le vin.

Tiens, voilà Pierre Fitzgibbon qui change de côté de table pour rejoindre Geneviève Guilbault, vice-première ministre responsable des Transports, avec qui il entreprend une très longue conversation de travail.

Vers la fin de la soirée, Pierre Fitzgibbon se déplace tranquillement vers la table de La Presse, entre autres. Avec mon patron Jean-François Codère, on l’aborde notamment sur la revente de Rona, qu’il commente habilement. Jean-François s’empresse de transmettre la citation au pupitre de La Presse pour le texte qui sera publié le lendemain. Il est 22 h 25.

Nos décideurs viennent de traverser deux années pandémiques éprouvantes, à transformer l’organisation du travail de fond en comble et à gérer des problèmes humains… sur Zoom.

Ils font aujourd’hui face à de nombreux défis, que ce soit la pénurie de main-d’œuvre, l’inflation, la chute de la Bourse ou les effets de la guerre.

Et en toile de fond, il y a, bien sûr, les inévitables changements climatiques et leurs effets dramatiques, pour lesquels nos décideurs, plus conscientisés qu’on ne le pense, peinent à mettre en œuvre des solutions, en manque de lignes directrices claires.

Depuis 200 ans, ce sont ces milliers de décisions hebdomadaires, à gauche comme à droite, qui ont fait de Montréal et du Québec un milieu prospère, plus égalitaire qu’ailleurs, francophone, diversifié et ouvert aux affaires. Bien sûr, durant ce parcours, il y a eu de mauvaises décisions ou d’autres qui n’ont pas fait l’unanimité. Il y a eu aussi des décisions qu’il faudrait changer, assurément.

Mais aujourd’hui, ce n’est pas le sujet. Aujourd’hui, je veux lever mon verre à tous ceux qui, quotidiennement, ont la responsabilité de guider leurs troupes, de prendre des risques et de trancher. Et qui doivent dormir avec les conséquences.