Éric Fournier a commencé sa carrière chez Secor, le McKinsey québécois des années 1980 et 1990, où il a appris le métier de planificateur stratégique qu’il a ensuite pratiqué comme vice-président chez deux géants québécois, Bombardier puis le Cirque du Soleil, avant de décider de voir plus petit, mais plus loin, en s’associant en 2007 à la jeune entreprise Moment Factory.

Lorsqu’il s’est joint à Moment Factory, l’entreprise de production d’expériences multimédia comptait 13 employés et avait le Cirque du Soleil comme principal client.

« Après des années à faire du développement stratégique pour de grands groupes, j’ai senti l’appel de l’entrepreneurship et j’ai décidé de faire autre chose. J’ai étudié l’opportunité d’acheter le mont Sutton qui était à vendre en 2006 avant de décider de m’associer à Moment Factory, une entreprise créative que je connaissais bien et qui avait beaucoup de potentiel », me résume Éric Fournier.

Le spécialiste de la stratégie n’avait pas tort. Moment Factory est aujourd’hui un leader mondial dans son domaine. MF, comme il l’appelle, a réalisé plus de 500 projets à l’échelle planétaire, emploie 400 personnes et a des bureaux à Paris, New York, Tokyo et Londres.

Le 12 octobre prochain, lorsqu’il aura 60 ans, Éric Fournier va quitter l’entreprise qu’il a contribué à faire grandir pour en faire une référence mondiale en environnements immersifs.

L’entreprise transforme des lieux comme les aéroports de Los Angeles ou Newark, crée des parcours nocturnes en forêt, habille de lumières des structures comme le pont Jacques-Cartier, livre des productions multimédias en cathédrales, réalise des habillages visuels de spectacles comme ceux de Madonna ou du Super Bowl…

« Je suis de la génération à qui on a vendu le concept de Liberté 55. Je suis encore en bonne santé et l’entreprise se porte très bien. Les deux cofondateurs, Sakchin Bessette et Dominic Audet, vont poursuivre avec les employés clés de Moment Factory », indique Éric Fournier.

En se joignant à la jeune pousse de 2007, Éric Fournier a d’abord voulu créer une structure de revenus stables pour l’entreprise qui fonctionnait jusqu'alors de projet en projet. Il a développé un portefeuille d’activités pour optimiser les talents et décupler le nombre de projets en réalisation.

Une boîte à outils

Éric Fournier est arrivé chez Moment Factory avec un coffre à outils qu’il avait développé durant ses années comme consultant et comme vice-président stratégie chez Bombardier et au Cirque du Soleil.

« J’ai commencé à 21 ans chez Secor. On me donnait toutes les analyses à faire sur les entreprises que le groupe avait comme clientes. On était en pleine époque du REA (régime d’épargne-actions), c’était la naissance des Cascades, Jean Coutu, Sico…

« J’avais Marcel Côté et Yvan Allaire comme mentors. J’y suis resté 10 ans, puis Yvan Allaire m’a fait entrer en 1996 chez Bombardier Transport comme directeur de la stratégie au moment même où l’expansion dans le transport roulant prenait son envol », évoque Éric Fournier.

C’est à cette époque que Bombardier Transport sous la direction de Jean-Yves Leblanc fait l’acquisition en Europe d’Adtranz qui en fera le troisième constructeur de trains au monde.

Après cette transaction qui déplacera le développement stratégique au bureau de Berlin, Éric Fournier passe un an chez Bombardier Aéronautique avant de partir à l’été 2001, quelques mois avant les attentats du 11-Septembre.

Je voulais faire autre chose et la crise du transport aérien est survenue, c’est à ce moment-là que Daniel Lamarre est venu me chercher pour m’occuper de la stratégie de diversification du Cirque du Soleil.

Éric Fournier

De 2001 à 2006, Éric Fournier est responsable de la diversification des activités du Cirque qui veut construire des complexes hôteliers, exploiter des bars-restaurants, se lancer dans la production télé et la musique…

« C’était les années de folle expansion du Cirque du Soleil avec les spectacles permanents à Vegas et à Macao, le projet de déménagement du casino dans le bassin Peel, l’ouverture d’un théâtre à Miami. En 2006, j’ai décidé que j’étais mûr pour l’entrepreneurship », explique Éric Fournier.

Une décision qu’il ne regrette pas, pas plus que les années où il a appris le métier de planificateur stratégique où il a pu acquérir les outils qui lui ont permis de développer à son plein potentiel Moment Factory.

« J’ai beaucoup appris durant ces années chez Secor, Bombardier et au Cirque. Je m’ennuie de cette époque où Québec inc. se développait, où il y avait une cohésion avec la Bourse de Montréal, les maisons de courtage, les firmes d’avocats. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus dilué et Montréal semble traîner de la patte par rapport au reste du Canada au chapitre de l’entrepreneurship », déplore le futur retraité.