(Toronto) Les travailleurs des épiciers sont déterminés plus que jamais à obtenir des salaires plus élevés et de meilleures conditions de travail, affirme Unifor, qui lance ces jours-ci une période de deux ans de négociations pour plus d’une dizaine de conventions collectives dans ce secteur.

Ces opérations commenceront la semaine prochaine avec les négociations pour un contrat couvrant 3700 travailleurs de l’épicier Metro de la région du Grand Toronto, qui, fait inhabituel, ont déjà voté à 100 % en faveur d’une grève si un accord ne peut être conclu.

Le vote de grève envoie le message fort, non seulement à Metro, mais aux trois géants de l’épicerie, que leurs travailleurs en ont assez, a fait valoir la présidente nationale d’Unifor, Lana Payne.

« Nous devons envoyer […] le message très sérieux aux barons des supermarchés que les travailleurs méritent une part de ces profits, et qu’ils méritent d’avoir de meilleurs salaires, de meilleures conditions de travail et plus d’emplois à temps plein », a-t-elle affirmé.

« Nous voulons faire des gains importants dans cette ronde de négociations. Nous pensons que nous sommes bien placés pour le faire. »

Unifor représente plus de 11 000 travailleurs d’épicerie dans les principaux épiciers de l’Ontario, du Québec, de Terre-Neuve-et-Labrador et de la Nouvelle-Écosse, a précisé le syndicat. Mme Payne a indiqué que la prochaine convention collective à négocier concernera les travailleurs de Loblaw à Terre-Neuve-et-Labrador, cet automne.

Les travailleurs ont vu la qualité de leurs emplois s’éroder au fil du temps, et l’inflation ronge leurs salaires alors même que les épiciers affichent de solides bénéfices, a souligné Mme Payne.

La pandémie a montré à quel point les travailleurs des épiceries étaient essentiels, a affirmé Mme Payne, notant que plusieurs d’entre eux ont reçu ce qui a été surnommé une « prime de héros » au début de la crise, pour se la faire retirer par la suite — quelque chose que Courtney Cook, une employée de Metro dans la région de Toronto, a comparé à « une gifle ».

« C’est notre première négociation depuis la pandémie, a noté Mme Cook. Beaucoup de choses ont changé pendant la pandémie, et nous étions considérés comme des travailleurs essentiels. Je pense donc que tout le monde est simplement frustré que notre salaire ne reflète pas ce genre de statut. »

Unifor a tenu une séance de stratégie nationale en mai pour déterminer ses priorités de négociation dans le secteur de l’épicerie, a expliqué Mme Payne, alors que le syndicat espère établir un modèle et prendre de l’élan avec la première ronde chez Metro. Ces priorités comprennent des améliorations salariales importantes, un meilleur accès à de meilleures prestations de santé, l’élimination des disparités salariales, davantage de travail à temps plein et des protections d’emploi pour les travailleurs touchés par les changements technologiques, a-t-elle poursuivi.

La porte-parole de Metro, Stephanie Bonk, a indiqué dans un courriel que l’épicier était engagé à travailler avec le syndicat pour conclure une entente qui respectera les besoins des employés tout en donnant à l’entreprise la flexibilité requise pour atteindre et surpasser les attentes des consommateurs.

Une plus grande part du gâteau

Les principaux épiciers ont fait l’objet d’un examen public alors que l’inflation annuelle a bondi à travers le Canada l’an dernier, atteignant plus de 8 % en juin dernier alors que le coût des produits de première nécessité augmentait.

Les dirigeants des épiceries se sont exprimés plus tôt cette année devant une commission parlementaire chargée d’étudier les prix des produits alimentaires, niant les accusations selon lesquelles l’inflation des prix alimentaires était motivée par la recherche de profits.

Et les épiciers ont affiché des bénéfices. Jeudi, Empire Company a annoncé avoir gagné 182,9 millions au cours de son plus récent trimestre, contre 178,5 millions il y a un an. Loblaw, dans son dernier rapport trimestriel, a annoncé un bénéfice de 418 millions, contre celui de 437 millions de la même période l’an dernier, alors que la société avait réalisé un gain ponctuel grâce à une décision de justice. Et Metro, au deuxième trimestre, a affiché un bénéfice de 218,8 millions, par rapport à un profit de 198,1 millions un an plus tôt.

Unifor est déterminé à obtenir une plus grande part de ce gâteau pour les travailleurs, a affirmé Mme Payne.

« C’est vraiment difficile que nous mettions tout ce que nous avons pour cette entreprise. Et nous n’obtenons pas en retour ce que nous estimons mériter », a indiqué Mme Cook.

En plus d’un meilleur salaire, Mme Cook souhaiterait voir les emplois plus stables chez Metro, notamment en donnant aux travailleurs des heures de travail plus prévisibles afin qu’ils puissent mieux prioriser leurs familles et leur vie personnelle.

Selon elle, le vote de grève de 100 % montre que les travailleurs sont prêts à faire tout ce qu’il faut pour obtenir ce qu’ils méritent, et elle pense que les travailleurs des épiceries de tout le pays arriveront à la table de négociation avec le même genre de détermination.

Mme Payne pense que la pandémie a également rendu les Canadiens plus conscients des travailleurs de l’épicerie et de ce à quoi ils sont confrontés, et elle croit que cela se traduira par le soutien et la sympathie du public alors que les travailleurs négocient avec les épiciers.

« Ils ont risqué leur santé et leur sécurité chaque jour, pour aller travailler pour un emploi qui, dans de nombreux cas, ne leur versait pas un salaire décent », a-t-elle affirmé.

« Assez, c’est assez. Nous devons apporter de bonnes améliorations à cette convention collective, et la détermination de nos membres est très forte. Et je pense que ce vote de grève montre clairement qu’ils sont prêts à se battre s’ils en ont besoin. »