Le petit dernier d’Ubisoft, Skull and Bones, remplit plutôt bien son mandat premier : offrir des combats en mer épique dans un monde immense à explorer, en mode solo ou coopératif, dans la peau d’un pirate qui doit faire croître sa mauvaise réputation et améliorer son navire. Mais ce n’est pas une suite d’Assassin’s Creed : Black Flag et l’histoire est bien mince.

Développé depuis plus de dix ans, reporté à six reprises, Skull and Bones était d’autant plus attendu que le PDG d’Ubisoft l’a présenté récemment comme un « quadruple-A ». On justifiait ainsi le prix de vente de 79,99 $ -119,99 $ en édition de luxe – pour un jeu multijoueurs en ligne qui devait être gratuit, la fameuse recette de Fortnite qui fait saliver les studios. Le fait que ce soit Ubisoft Singapour qui mène le bal ajoutait une couche de fébrilité, puisque c’est à ce studio qu’on doit les combats navals dans Black Flag, encore considéré 11 ans plus tard par beaucoup comme le meilleur opus de la franchise Assassin’s Creed.

Skull and Bones, si on se fie à l’accueil plutôt glacial auquel il a droit depuis sa sortie vendredi dernier, ne marquera pas l’histoire de la même façon. On lui reproche surtout la pauvreté de son scénario, des mécaniques douteuses et quelques bogues encore présents.

De zéro à Kingpin

Nous avons pu passer une dizaine d’heures dans ce Skull and Bones, atteignant le quatrième rang sur dix des niveaux d’« infamie », soit celui de flibustier. Certains reproches sont mérités, mais ce jeu unique a des qualités qui le rendent particulièrement chronophage.

On personnifie ici un ou une pirate – c’est à vous de décider de son sexe et de son apparence – qui sévit au 17e siècle dans différents secteurs de l’océan Indien. Il repart à zéro quand son navire est détruit lors d’un affrontement avec les Britanniques et doit regrimper les échelons à partir du port de Sainte-Anne, d’où règne le brutal John Scurlock.

Votre objectif : devenir comme lui un « Kingpin », en affrontant trois armées régulières, les Français, les Hollandais et les Britanniques, et en jonglant avec quatre factions, les Ungwanas, le Clan de Fara, le Dominion de Rempah et le Peuple de la Mer.

Résumée en une phrase, votre mission consiste à piller suffisamment pour accumuler matériaux et argent pour améliorer votre navire et croître en réputation. On peut attaquer aveuglément n’importe qui sur mer ou remplir des contrats précis généralement plus payants.

CAPTURE D’ÉCRAN

Vous pouvez mener cette mission seul ou rejoindre d’autres joueurs en ligne que vous côtoyez dans les ports. Vous menez alors certains combats ensemble et vous partagez le butin, qui est plus grand quand plusieurs joueurs collaborent. Il est théoriquement possible de discuter avec vos partenaires mais cette fonction était désactivée chaque fois que nous l’avons essayée.

Embarras du choix

Le cœur de ce jeu, c’est de naviguer et de combattre en mer. Les images ici sont magnifiques et la mécanique est beaucoup plus subtile que dans Black Flag. Votre équipage vous fournit la voilure nécessaire mais s’épuise si vous le poussez trop. Vous devez vous armer de suffisamment de munitions, de nourriture et de kits de réparation pour tenir bon devant l’ennemi.

CAPTURE D’ÉCRAN

Et une fois l’ennemi affaibli, vous pouvez vous lancer à l’abordage si vous êtes suffisamment proche. À la déception de certains, il n’y a pas de combat à main armée à ce moment-là : vous ne faites que récolter votre butin. Si vous êtes coulé, vous devez revenir récupérer votre cargaison avant qu’un pirate ne vous la chipe.

On pourrait décrire pendant des heures toute la subtilité de l’équipement et de l’armement de votre navire, dont il existe dix types, de plus en plus puissants et coûteux. Votre argent et vos matériaux vous permettront d’acheter canons, bombardes et mortiers de plus en plus ravageurs. Votre équipement comprend des outils de navigation, notamment des lunettes plus performantes, des outils de chasse pour attraper poissons et animaux, des outils de récolte pour scier du bois, récupérer des matériaux des épaves ou exploiter des mines.

Les dialogues ponctuent votre cheminement dans la société des pirates, alors que vous rencontrez les chefs de différentes factions, mais votre personnage ne parle pas, il ne répond qu’avec des choix de phrases proposés. Votre équipage, lui, chante et commente à qui mieux mieux quand vous êtes attaqué ou qu’un butin intéressant se profile à l’horizon.

Charmes et imperfections

On a déploré quelques bogues durant notre essai, le jeu gelant en deux occasions lors d’un dialogue. La mécanique est complexe et nous sommes loin d’avoir tout compris. On a reçu par exemple à plusieurs reprises une alerte « Condamné(e) à mort » parce qu’on aurait trahi la Timonerie. Elle était annulée sans explication quelques secondes plus tard. Si on a ajouté une section Connaissances, on peine encore à comprendre à quoi servent de nombreux objets, où trouver les matériaux demandés, à qui il faut les donner.

CAPTURE D’ÉCRAN

Et si la franchise Assassin’s Creed nous a appris à accepter toutes les missions qu’on nous offre, quitte à les accomplir plus tard, nous n’avons jamais réussi dans Skull and Bones à retrouver nos missions. Il semble qu’il faille en accomplir une seule à la fois.

Même si nous ne sommes pas particulièrement friand de multijoueur en ligne, de ces jeux de tir tactique dont le but premier est d’améliorer son arsenal, Skull and Bones a un charme indéniable. La mer, les combats navals, la découverte de tous ces ports, îles et personnages sanguinaires valent le détour et nous ont rapidement séduit. « Des côtes africaines aux îles tropicales luxuriantes des Indes orientales », il s’agit d’un jeu ambitieux, peut-être trop, mais qui offre une base solide pour ces « univers persistants » dont rêve Ubisoft.

Skull and Bones

  • Développeur : Ubisoft Singapour (avec collaboration d’autres studios, dont Montréal)
  • Éditeur : Ubisoft
  • Date de sortie : 16 février 2024
  • Prix (édition standard) : 79,99 $

Note : 7 sur 10

Visitez la page officielle de Skull and Bones