Non, pas Madonna aussi ! Quand nous avons appris que la chanteuse avait dû être hospitalisée aux soins intensifs après avoir contracté une grave infection bactérienne, j’ai pensé qu’elle s’ajoutait à une liste de plus en plus longue de stars forcées d’annuler ou de reporter leurs tournées pour des raisons de santé.

Nous savons que les artistes aujourd’hui gagnent davantage leur vie en vendant des billets de spectacles que des albums. Pour les plus grandes stars, ça passe par d’énormes tournées mondiales ou des résidences à Las Vegas.

Ces spectacles sont d’immenses machines qui font travailler des centaines de gens et qui doivent être organisées des années à l’avance. Cela repose bien souvent sur les épaules d’un seul grand nom, ce qui doit être lourd à porter. Il y a quelque chose d’inquiétant à voir des mégavedettes tomber les unes après les autres, après avoir annoncé en grande pompe leurs dates de tournée. Mais ça se passe aussi à l’échelle du Québec, comme l’a expliqué ma collègue Marissa Groguhé dans cet article en janvier :

Lisez « Artistes épuisés, tournées annulées »

Ce fut le cas de Justin Bieber l’an dernier, lorsqu’il a révélé être atteint du syndrome de Ramsay Hunt, qui paralysait la moitié de son visage. Puis de Céline Dion, qui souffre du « syndrome de la personne raide » et dont la tournée Courage, plusieurs fois reportée, a été abandonnée. Stromae aussi a dû renoncer à son grand retour sur scène en raison de problèmes de santé persistants. Et maintenant Madonna, dont la dernière publication sur Instagram le 20 juin la montrait en répétition, avec ces mots pleins de promesses : « The Calm Before the Storm… ».

Parfois, on ne peut pas savoir d’où la tempête va arriver. Sa tournée, qui sera retardée, devait commencer le 15 juillet à Vancouver, avec un passage par Montréal deux soirs en août. Il y en a beaucoup qui doivent être tristes aujourd’hui, mais son agent prévoit un rétablissement complet.

Il faut être dans une forme olympienne pour chauffer les foules aux quatre coins du monde, en subissant les décalages horaires. Est-ce qu’on en demande trop à ces artistes qui sont des valeurs sûres pour remplir des stades de plus en plus gros ?

Je veux bien croire que cela fait partie du métier, mais est-on en train d’oublier l’aspect humain dans ces entreprises gigantesques ? Est-ce que les corps ne finissent pas par flancher sous une telle pression ? Je n’ai rien d’ésotérique, mais je me pose des questions.

Je crois aussi qu’on oublie l’impact qu’a eu la pandémie sur ces vedettes marathoniennes qui ont subi, comme tout le monde, une pause forcée ayant atrophié temporairement même les gens les plus en forme. Ce trou noir de deuxans a peut-être joué un rôle dans certains effondrements. Il faut être un peu athlète pour mener jusqu’au bout ces projets titanesques, et Madonna, une reine de la chorégraphie, n’a pas le choix d’être physiquement au top.

Bref, à vouloir faire les plus gros shows au monde, est-on en train de brûler les étoiles ? Je n’ose pas imaginer ce que cela doit faire au moral (et au portefeuille), annuler ce genre de tournée, en mettant des tas d’employés au chômage tout en décevant des millions de fans. Ce n’est sûrement pas par caprice qu’on choisit de se retirer, car ça doit coûter cher en assurances.

PHOTO REGIS DUVIGNAU, ARCHIVES REUTERS

Céline Dion au défilé de la collection Haute Couture du créateur Alexandre Vauthier à Paris, en 2019

Parfois, on est trop jeune pour supporter une telle pression. Dans d’autres cas, le temps file et on ne rajeunit pas. Mais la maladie peut frapper à tout âge, on le voit avec Justin Bieber (29 ans), Stromae (38 ans) et Céline Dion (55 ans). Sauf que n’importe qui peut attraper une bactérie dangereuse, même Madonna (64 ans).

Je me rends compte que j’ai fait partie des chanceux qui ont pu voir le spectacle de Céline au Centre Bell, avant que la planète s’arrête à cause d’un virus, sans me douter qu’elle ne pourrait plus être en mesure de reprendre sa carrière là où elle avait dû la laisser, sans savoir si jamais elle pourra la reprendre un jour. Je n’ai pris aucun risque pour le récent concert de Depeche Mode, qui aurait pu ne pas exister, alors que le groupe a perdu l’an dernier Andrew Fletcher, l’un de ses membres fondateurs. D’autant plus que j’avais laissé passer le dernier show de Prince à Montréal, donné un mois avant sa mort à 57 ans en 2016.

Les fans de Madonna qui ont failli faire une crise cardiaque en apprenant la nouvelle de son hospitalisation vont, à n’en pas douter, protéger leurs billets comme la prunelle de leurs yeux. À Madonna comme à eux, je souhaite un prompt rétablissement (et surtout un bon spectacle).