La cheffe de la direction de l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM), Madeleine Careau, a annoncé qu’elle quittera ses fonctions à la fin du mois de juin. Après 24 années à la tête de l’orchestre, celle qui s’est démarquée par son leadership et son esprit de visionnaire en est venue à la conclusion que le moment était venu pour elle de passer le flambeau à quelqu’un d’autre.

L’annonce a été faite lundi, en fin d’après-midi, aux employés et aux musiciens de l’OSM. « Servir l’OSM est pour moi un immense honneur depuis maintenant presque 25 ans. C’est le plus beau chapitre de ma vie professionnelle. Un chapitre qui m’a fourni l’occasion de collaborer avec des gens exceptionnels », écrit-elle dans une lettre remise à son équipe.

En entrevue avec La Presse, Madeleine Careau a reconnu que cette décision fut « déchirante ». Elle avait souhaité se retirer il y a quelques années, mais le déclenchement de la pandémie de COVID-19 a eu pour effet de mettre sa décision en veilleuse.

Puis des discussions ont refait surface en septembre dernier. « Ça fera bientôt 50 ans que j’évolue dans le monde de la culture, dit-elle. Quitter cette institution alors que l’industrie tente de se remettre des effets de la pandémie, était-ce le bon moment ? Finalement, je crois que oui. J’ai le sentiment d’avoir pris la bonne décision. »

Au cours de son règne, Madeleine Careau a su procurer une stabilité financière qui menaçait la survie de l’institution au moment où elle a été embauchée, notamment grâce à la création, en 2009, de la Fondation de l’OSM. Elle a également été celle qui a créé un climat plus « serein et fécond », peut-on lire dans le communiqué de presse.

Pour atteindre ces objectifs, Madeleine Careau a pu compter sur des personnes influentes, trois en particulier, qu’elle a souhaité remercier : Michael Turcotte, président du conseil d’administration lors de son arrivée, Jacques Laurent, son successeur pendant quatre ans, et Lucien Bouchard, qui assume cette fonction depuis 2004.

Ce dernier a tenu à souligner l’immense contribution de Madeleine Careau au rayonnement de l’orchestre depuis qu’elle s’y est jointe, en février 2000. « Travaillant souvent dans l’ombre, alors que les réflecteurs sont projetés sur les musiciens et leur chef, Mme Careau a été une grande cheffe d’orchestre à sa façon, s’assurant que toutes les équipes, artistiques comme administratives, suivent la même partition et collaborent en harmonie pour le bien de l’institution et de ses divers publics. »

Durant son mandat, Madeleine Careau a posé plusieurs gestes importants qui ont contribué au développement de l’OSM. Mentionnons le recrutement du maestro Kent Nagano en 2006, le lancement de la Virée classique, l’ouverture, en 2011, de la Maison symphonique, la création, en 2016, du programme La musique aux enfants et l’embauche, en 2021, de Rafael Payare, l’actuel directeur artistique de l’orchestre.

Lors d’un entretien accordé à l’auteur de ces lignes, en janvier 2022, Madeleine Careau est revenue sur son riche parcours. Après un passage à l’Orchestre symphonique de Québec et au Festival d’été de Québec, elle se joint au noyau qui crée, à la fin des années 1970, l’ADISQ.

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De 1983 à 1985, elle est cheffe de cabinet du ministre de la Culture Clément Richard. Puis, en 1985, elle accepte de faire équipe avec Guy Fournier afin de mettre sur pied Télévision Quatre-Saisons.

Au fil du temps, elle est devenue une spécialiste des galas télévisés. C’est donc naturellement vers elle qu’on se tourne pour créer le gala des prix Gémeaux. Durant de nombreuses années, elle est responsable du bureau parisien de Juste pour rire avant de devenir l’inébranlable bras droit de Luc Plamondon durant l’aventure de Notre Dame de Paris.

À l’automne 1999, lors d’une visite au Québec, on lui demande de relever un énorme défi : sortir l’Orchestre symphonique de Montréal de la période difficile qu’il traverse. Après une longue hésitation, elle accepte ce mandat.

Madeleine Careau a été faite Chevalière de l’Ordre national du Québec en 2020. Après un quart de siècle à la tête de l’OSM, elle laisse une forte empreinte.

Que compte faire maintenant cette éternelle active à compter du 30 juin ? « Je vais d’abord me reposer, voir mes amis et ma famille que j’ai beaucoup négligés ces dernières années. C’est sûr que je ne m’embarquerai pas avec une institution de la taille de l’OSM. Mais j’aimerais m’impliquer dans divers projets, comme celui des enfants et de la musique. »

Le conseil d’administration de l’OSM créera prochainement un comité de recrutement, afin d’assurer la succession de Madeleine Careau. Les travaux du comité devraient s’échelonner sur quelques mois.