Essai routier Honda Accord : sauvez mon âme

Elle a 47 ans, 11 générations, près de 1 million d’exemplaires vendus au Canada et un dénominateur commun : quatre portières. Peu de modèles peuvent présenter un résumé aussi complet tout en respectant leur forme initiale que la Honda Accord. La berline intermédiaire a survécu à bien des tumultes grâce à son rôle essentiel dans la conquête nord-américaine du constructeur japonais. Pour confirmer sa pertinence, elle vient de se relancer avec une nouvelle génération à posture évolutive. Nous en avons pris le volant pour constater si la flamme reluit toujours.

Le design

Pour l’essentiel, cette Accord, 11^e du nom, présente les mêmes dimensions que celle qu’elle remplace. C’est sur sa longueur surtout que la nouvelle berline se distingue, avec 70 mm de plus affichés sur le ruban à mesurer, ce qui la rend à peine 10 cm plus courte qu’un Honda Pilot. C’est donc un véhicule passablement longiligne que Honda apprête, surtout lorsqu’il est observé sur un plan latéral. Un trait discontinu tracé sur le haut de la ceinture de caisse nous le rappelle d’ailleurs visuellement. Le capot bas et la ligne de toit arrière fuyante semblant inspirée des berlines « liftback » ajoutent de la vitalité au rendu qui peut paraître un peu anonyme, surtout à l’avant. La calandre abaissée et large se veut nettement moins affirmée qu’auparavant. Cette observation s’applique aussi aux feux arrière. Cela dit, le traitement visuel des diodes rend la présentation plus raffinée qu’antérieurement.

À bord

À l’intérieur, on constate que Honda n’a pas perdu de vue les fondamentaux de la conception d’un habitacle. La planche de bord est constituée de composants de bonne qualité dont les matières souples et l’assemblage inspirent la plus grande des confiances. Tous les éléments avec lesquels nos mains interagissent — touches, molettes, bras – donnent une impression de solidité tout en offrant une ergonomie irréprochable. La bande en nid d’abeille qui camoufle les buses assure en parallèle un élément de continuité et de différenciation nécessaire. C’est certainement le travail le plus abouti du segment pour l’ensemble de son œuvre. Du reste, notons l’espace intérieur qui, malgré son volume légèrement inférieur à celui de la 10^e génération, demeure extrêmement généreux partout où l’on se trouve. On aurait sans doute souhaité un peu plus de dégagement pour la tête à l’arrière, mais cette Accord se situe dans la bonne moyenne sur ce plan.

Sous le capot

Dans un effort d’uniformisation misant sur l’hybride, la marque a choisi d’abandonner le quatre-cylindres turbocompressé de 2 L optionnel pour lui préférer un groupe hybride. Ainsi, le quatre-cylindres turbo de 1,5 L (192 ch) nous accueille à l’entrée alors qu’un quatre-cylindres de 2 L hybride s’avance en option. Cette mécanique, également utilisée par le CR-V, produit 204 ch et est très coupleuse avec ses 246 lb-pi en réserve grâce à un duo de moteurs électriques. C’est sur ce punch initial qu’elle se démarque, en plus de son raffinement d’ensemble et sa progressivité. Le dialogue entre les moteurs est transparent et le niveau sonore du moteur thermique est extrêmement bas. Certes, on ne sera jamais plaqué contre le dossier, mais les accélérations sont d’une fougue plus qu’acceptable. La consommation, vous demandez ? Autour des 5,4 L/100 km au cours de l’essai, ce qui la place parmi les meilleures du segment.

Derrière le volant

Misant sur une position de conduite plutôt basse, cette Accord nous gratifie d’abord d’un volant bien dessiné et d’un vrai levier de vitesses pour l’introduction. Le passage sur les premières aspérités confirme une belle attention apportée à l’amortissement sans que cela relève d’une mollesse excessive, une observation qui peut être en partie attribuable aux multiples améliorations en rapport à la rigidité du châssis. Les pneus à flanc mince des livrées Sport et Touring — les seules hybrides — font néanmoins comprimer de manière excessive les amortisseurs lorsqu’on négocie des nids-de-poule. La direction appuie l’ensemble avec la verve nécessaire. D’une fermeté bien équilibrée et d’une précision quasi irréprochable dans sa horde, elle communique néanmoins très peu sur le comportement du train avant. C’était à prévoir. Le freinage est facilement modulable et Honda propose une fonction regénérative ajustable au moyen de palettes au volant.

Les technologies embarquées

L’Accord 2023 introduit l’amarrage des diverses applications Google à même le système multimédia du constructeur. Cela permet donc d’interagir directement avec Google Maps ou Google Play. Ces fonctions ne sont néanmoins offertes qu’à bord de la version Touring, qui est la plus onéreuse. S’ajoutent à cela Android Auto et Apple CarPlay sans fil de série. On dénote en outre une meilleure fluidité dans l’ensemble, comparativement aux cuvées plus âgées des systèmes Honda, tant dans le traitement des commandes que dans les animations. Le positionnement des onglets importants à gauche est aussi fort astucieux. Comme précisé auparavant, la marque japonaise n’a pas fait l’impasse sur les touches physiques, ce qui rend son utilisation encore plus intuitive et donne sans doute une meilleure pérennité à la voiture. Il y a également un souci de l’ergonomie irréprochable dans leur disposition, surtout sur le volant.

Le verdict

La Honda Accord constitue encore et toujours une option sérieuse dans un segment qui s’étiole face au grand et lourd rouleau compresseur des VUS. Sans récolter les fruits d’un changement de forme fondamental qui aurait pu intégrer le rouage intégral, elle fait le pari de polir ses atouts. Certains pourraient voir dans cette stratégie une capitulation progressive de Honda face à la voiture traditionnelle. Dans les faits, il n’en est rien. L’Accord demeure une création très complète et extrêmement bien confectionnée, tout en offrant un habitacle plus volumineux que celui de bien des VUS. Sa mécanique hybride reste la plus raffinée chez les intermédiaires, tout en s’approchant de la Toyota Camry hybride en consommation, sans toutefois lui ravir sa couronne. Avec un léger supplément d’âme dans son comportement et un moteur hybride plus abordable pour compléter son excellent boulot, cette Accord pourrait en somme parachever son excellent boulot.