(Montréal) Ensaf Haidar, l’épouse du blogueur Raïf Badawi, qui est toujours retenu en Arabie saoudite après 10 ans d’emprisonnement, assistera lundi à une projection spéciale à Vienne du documentaire En attendant Raif au parlement autrichien.

Mme Haidar, qui a trouvé refuge à Sherbrooke avec ses trois enfants en 2013, lutte pour la libération de son mari depuis qu’il a été emprisonné en 2012 et condamné en 2014 à une peine de 10 ans d’emprisonnement, 1000 coups de fouet et à une amende d’un million de riyals saoudiens pour avoir critiqué les autorités religieuses du pays.

Mme Haidar a rappelé en entrevue téléphonique que même s’il est sorti de prison, Raïf Badawi n’a pas la permission de quitter l’Arabie saoudite ou de s’exprimer publiquement jusqu’en 2032, ce qui l’empêche de rejoindre sa famille à Sherbrooke.

« Ce n’était pas facile pour nous, les gens doivent comprendre comment les enfants vivent sans leur père », a confié celle qui milite encore pour inciter les gouvernements occidentaux à mettre de la pression sur l’Arabie saoudite pour lever son interdiction de voyager.

« L’un des objectifs en faisant ce film, c’était de ramener l’histoire de Raïf Badawi dans l’actualité », a indiqué Patricio Henriquez, qui a coréalisé le documentaire avec Luc Côté.

Ce sont les Verts, formation politique écologiste ayant intégré la coalition de gouvernement d’Autriche depuis 2020, qui sont à l’origine de l’évènement de lundi qui marquera le premier anniversaire de la libération de Raïf Badawi, indique un communiqué.

Pendant plus de huit ans, des Viennois ont tenu des vigiles tous les vendredis pour dénoncer le traitement que l’Arabie saoudite inflige à la famille Badawi et au blogueur saoudien.

« Je suis contente, parce que les Autrichiens étaient avec nous depuis le début », a affirmé Mme Haidar, ajoutant que le soutien international, « ça aide pour Raïf, mentalement, et aussi pour changer l’interdiction de quitter le pays ».

Interrogé sur les raisons qui ont poussé les citoyens autrichiens à s’attacher à cette cause, M. Henriquez a expliqué que l’histoire de M. Badawi est « très connue dans les pays germanophones ». « Il y a un élément déclencheur, c’est la première flagellation de Raïf », en 2015, dit-il. Une vidéo avait alors fait le tour de la planète, et « au 21e siècle, voir un être humain se faire flageller sur la place publique, ça avait quelque chose d’insupportable ».

La projection du film En attendant Raif aura lieu le 24 avril à la salle historique Theophil Hansen. Le documentaire observe de l’intérieur les épreuves traversées par cette réfugiée mère de trois enfants, tant au Québec, sa terre d’adoption, que sur la scène internationale.

Ensaf Haidar prendra la parole à la fin du film.

Elle retournera à Vienne en juin, cette fois à l’invitation du ministère des Affaires étrangères de l’Autriche et participera à un évènement marquant le 30e anniversaire de la Déclaration de Vienne, sur les droits de la personne.

En attendant Raif sera aussi présenté à Montréal le 2 mai, au Musée McCord Stewart, dans le cadre de la Semaine de la presse et des médias. Une table ronde avec Mme Haidar et les réalisateurs suivra la projection.

Le long métrage a déjà été présenté en Allemagne, et autant M. Henriquez que Mme Haidar souhaitent participer à d’autres évènements internationaux de ce genre.

« N’oubliez pas Raïf », plaide-t-elle.