Une affaire pour le moins saisissante fait les manchettes depuis quelques jours : des militants « noirs » ont censuré le conteur « noir » Franck Sylvestre qui présente un spectacle pour enfants mettant en scène une marionnette « noire ». L’apparence de cette dernière aurait apparemment le même effet qu’un blackface.

Son spectacle a été annulé à Beaconsfield, mais il reste à l’affiche aujourd’hui à la Maison de la culture Claude-Léveillée, à Montréal. Cette controverse, qui a dépassé nos frontières et retient maintenant l’attention de nos cousins français, permet de mettre en lumière une réalité : l’hypocrisie derrière le mouvement antiraciste.

L’un des organismes de militants « noirs » derrière cette saga, la Coalition rouge, qui se définit comme un groupe de pression luttant notamment contre le racisme systémique, s’évertue ainsi à mettre des bâtons dans les roues d’un artiste « noir » en utilisant des attaques racistes.

Vendredi, l’un des directeurs de cette association, Alain Babineau, y est allé de plusieurs tweets révélateurs de son état d’esprit, qualifiant entre autres Franck Sylvestre de « bon Noir », une épithète qu’aucun « Blanc » ne pourrait prononcer sans provoquer un scandale.

S’en prenant par la bande à la Maison d’Haïti, un organisme qu’il accuse d’appuyer « la continuité du racisme dans notre belle province » parce qu’il soutient M. Sylvestre, il a également insulté cet artiste à mots couverts en l’invitant à changer de planète s’il ne comprend pas que sa marionnette est inacceptable dans un contexte nord-américain. Ces propos rappellent étrangement la remarque raciste « Si t’es pas content, retourne chez vous », qui semble avoir été revisitée pour les besoins de la cause. Il y a fort à parier qu’en temps normal, cet activiste grimperait dans les rideaux si une de ses ouailles se faisait lancer de tels propos.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Franck Sylvestre et sa marionnette

M. Babineau ne s’est pas arrêté là. Il y est allé de cette tirade : « Quand est-ce que les communautés noires de Montréal vont parler d’une seule voix ? Il existe malheureusement beaucoup trop de “vendus” qui ne pensent qu’à leur petit bonheur en s’efforçant de ne pas déplaire à leur “maître” ! » Imaginons un instant qu’une personne à la peau blanche avait traité un « Noir » de « vendu » voulant plaire à son « maître » blanc. Le commentaire aurait immédiatement été traité de raciste, et avec raison.

Attaquer quelqu’un sur la base de la couleur de sa peau est tout simplement inadmissible. En agissant de la sorte, Alain Babineau va à l’encontre des valeurs qu’il prétend défendre.

Ainsi, tout en poussant un cri de ralliement, cet activiste y est allé de propos méprisants envers ceux qu’il semble considérer comme des traîtres. Ironiquement, sa tentative malhabile de rameuter les troupes risque plutôt de faire fuir bon nombre de citoyens « noirs » qui souhaitent rester loin de discours aussi polarisants. Que des militants critiquent le spectacle de M. Sylvestre, soit, mais que M. Babineau tente d’éliminer définitivement cette marionnette en papier mâché en évoquant de surcroît l’ethnie de son créateur, ça ne passe pas.

Il est temps que nous cessions de trembler face à cette infime minorité de militants avides de pouvoir qui ne parlent qu’en leur nom, dégradant le climat social et dénaturant le véritable sens de la lutte contre le racisme.

Et c’est d’autant plus vrai pour nos élus. Sous quel prétexte devrions-nous offrir une telle visibilité à des groupes antiracistes qui renforcent les stéréotypes en sous-entendant que tous les « Noirs » pensent pareil ? Cette saga met en évidence ce que beaucoup d’entre nous savent déjà : ces activistes « noirs » privilégiés défendent des idéologies avant de défendre des individus. Ils le démontrent ici en menant une charge disgracieuse contre l’un des « leurs » qui, visiblement, n’adhère pas à leurs idées dogmatiques.

M. Sylvestre a été attaqué parce qu’il est « noir ». Les propos irrecevables et l’hypocrisie de M. Babineau et de son organisation doivent être dénoncés.

* Cosignataires : Frédéric Bastien, cofondateur de l’Association des Québécois unis contre le racialisme (AQUR) et Isabel Dion, présidente de la Commission de la citoyenneté du Bloc québécois

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