Chaque vendredi, nous revenons sur la semaine médiatique d’une personnalité ou d’une institution qui s’est retrouvée au cœur de l’actualité.

Les files d’attente interminables à la douane, la circulation difficile autour de l’aéroport et les ratés de l’autobus 747 ont été au cœur d’une tempête médiatique cette semaine, tempête qui a forcé Aéroports de Montréal (ADM) et la Société de transport de Montréal (STM) à répondre à des questions difficiles dans les médias. Et à réagir. Résultat : j’ai appris que d’ici huit semaines, la STM va mettre sur pied un projet pilote qui permettra l’achat d’un passage pour la ligne 747 avec son téléphone et un code QR, une première dans le réseau.

Mais revenons sur l’actualité de la semaine : les principaux intéressés avaient-ils vu la tempête se dessiner à l’horizon, ou ont-ils été pris de court ?

Du côté d’ADM, on assure qu’on était déjà en mode vigilance quelques jours avant la panne informatique de dimanche dernier, m’explique Martin Massé, vice-président aux affaires publiques et au développement durable. « Avec l’arrivée de nombreux demandeurs d’asile, on avait déjà augmenté les ressources au contrôle frontalier, souligne-t-il. Or, un aéroport c’est comme un hôpital : si on déplace du personnel en deuxième ligne, la première ligne souffre. L’attente avait augmenté et on voyait déjà que les gens en parlaient dans les réseaux sociaux. Les équipes médias étaient prêtes à répondre aux questions des journalistes et on avait déjà eu des rencontres avec les services frontaliers pour trouver des solutions. »

Comble de malchance, une panne informatique survient dimanche. La direction d’ADM n’est pas en mode panique. « Il y avait déjà eu des pannes nationales de bornes, on a basculé en procédure manuelle, ce qui est prévu dans les circonstances, m’explique M. Massé. Mais c’est certain que les files d’attente se sont allongées. »

Un peu plus tard dans la journée, les dirigeants d’ADM apprennent que l’aéroport a été la cible d’une cyberattaque. Mais c’est seulement le lendemain que Martin Massé apprend, dans les médias, qu’il y a un lien entre la panne et l’attaque. « Jusque-là, on ne le savait pas », m’assure-t-il.

PHOTO PATRICK SANFAÇON, LA PRESSE

Des passagers montent dans un autobus de la ligne 747 à l’aéroport Montréal-Trudeau.

Le hasard fait en sorte que le jour de la panne, mon collègue Henri Ouellette-Vézina publie un reportage sur les déboires de l’autobus 747 qui fait la liaison entre l’aéroport et le centre-ville de Montréal, un texte sur lequel il travaillait depuis un certain temps⁠1. Personne n’avait pu prévoir qu’il serait publié le jour d’une panne. Ce doublé dans La Presse a l’effet d’un petit électrochoc. Tant mieux !

Du côté de la STM, on dit ne pas avoir été surpris par le texte portant sur les ratés de la ligne 747.

On vit les contrecoups de ce qui se passe à l’aéroport : les vols en retard, les files d’attente, le trafic…

Nathalie Clément, directrice exécutive, livraison de services à la STM

« Nous sommes habitués de déplacer beaucoup de monde et nous sommes excellents pour le faire, ajoute-t-elle, citant pour exemples les spectacles de Metallica ou le Marathon de Montréal. Mais à l’aéroport, on ne contrôle pas notre environnement. »

Une entrevue corsée

À son micro le lundi matin, l’animateur Paul Arcand y va d’une tirade bien sentie contre ADM. « J’ai honte de l’aéroport de Montréal », déclare-t-il avant d’interviewer un représentant du syndicat des services frontaliers.

Le lendemain, c’est au tour de Martin Massé de se présente au micro de la matinale du 98,5. Pourquoi pas le nouveau PDG, Yves Beauchamp ? « Il est en poste depuis le début septembre seulement, m’explique M. Massé. Il apprend encore les rouages de l’aéroport et il n’était pas là quand les actions ont été prises. Comme je suis membre de l’équipe de direction, je participe aux décisions, je pouvais répondre aux questions. »

Pour une entreprise ou une institution qui connaît des problèmes et qui a des comptes à rendre à la population, être invité au micro de Paul Arcand, on va se le dire, ce n’est pas nécessairement une partie de plaisir.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

Les files d’attente interminables à la douane, la circulation difficile autour de l’aéroport et les ratés de l’autobus 747 ont été au cœur d’une tempête médiatique cette semaine.

« Je n’étais pas là pour dire que tout est parfait », affirme Martin Massé.

On partage la déception des gens. On les voit, les files d’attente, on est des voyageurs nous aussi ainsi que notre famille. Je n’allais pas défendre une position avec laquelle je n’étais pas à l’aise.

Martin Massé, vice-président aux affaires publiques et au développement durable chez Aéroports de Montréal

Il qualifie l’entrevue de « bon débat ». « Parfois, pendant des entrevues, Paul Arcand regarde son ordinateur pour lire les courriels des auditeurs. Cette fois, l’entrevue s’est faite les yeux dans les yeux », raconte M. Massé dont on a souligné le calme durant l’interview, même quand ça chauffait un peu.

« Ma mère m’a félicité, lance le principal intéressé en riant. Les gens qui me connaissent savent que c’est dans ma nature. » Excellente performance, donc. Maintenant, il faut régler les problèmes !

Comment calmer la tempête

Disons que l’attention médiatique a créé un sentiment d’urgence qui a permis d’appuyer sur l’accélérateur pour mettre en place certaines solutions rapidement.

À court terme, la STM va ajouter de six à huit autobus par jour ainsi que des terminaux de point de vente, explique Nathalie Clément de la STM. Et à moyen terme, des distributrices de billets supplémentaires. Et lancer son projet pilote pour l’achat d’un passage avec téléphone et code QR pour la ligne 747.

La STM rencontrera également ADM lundi pour déterminer comment mieux anticiper les flux de voyageurs.

La pression a donc été forte, mais la représentante de la STM ne voit pas ça comme une crise. « Une crise, pour nous, c’est quand des fissures apparaissent au plafond du tunnel entre les stations Berri-UQAM et Saint-Laurent et qu’il faut interrompre le service sur la ligne verte. Ça, c’est une crise. »

Cela dit, on est conscients des problèmes et la tempête de cette semaine confirme qu’il faut agir rapidement.

Nathalie Clément, directrice exécutive, livraison de services à la STM

Crise ou tempête, le dossier s’est transporté dans l’arène politique. Les ministres fédéral et provincial des Transports, Pablo Rodriguez et Geneviève Guilbault, ont manifesté leur impatience et s’attendent à des résultats.

« Je suis content que tous les deux aient déclaré qu’il s’agissait d’une responsabilité collective, souligne Martin Massé. Vous savez, j’aime mieux la situation actuelle que celle d’il y a deux ans, quand l’aéroport était vide durant la pandémie. Notre objectif, c’est de régler le problème. Quand ce sera fait, on ne sera plus dans les médias. »

1. Lisez l’article « La ligne d’autobus 747 est surchargée » Qu’en pensez-vous ? Participez au dialogue