Il serait bien téméraire d’utiliser une élection partielle, en début de mandat de surcroît, pour tenter de prédire ce qui pourrait se passer dans trois ans en politique québécoise. Mais il y a, au moins, quelques indications sur une question qui préoccupe tous les partis de l’opposition : lequel d’entre eux pourrait se présenter comme la solution de rechange au gouvernement de la Coalition avenir Québec (CAQ) ?

D’entrée de jeu, éliminons l’un d’entre eux, au moins pour un temps : non seulement le Parti libéral du Québec (PLQ) n’a pas de chef, mais il semble n’y avoir personne qui souhaite en devenir le chef. Le comité qui réfléchissait sur l’avenir du PLQ présentera son rapport sous peu et il faudra voir quelles suites il aura. Et ce qu’en fera le nouveau chef quand il sera désigné.

Il faudra donc attendre encore un peu avant de savoir si le PLQ peut retrouver la pertinence qu’il a du mal à démontrer depuis les dernières élections.

Le Parti québécois (PQ) a remporté une belle victoire dans Jean-Talon, et il se voit tout naturellement comme l’« alternative » au gouvernement, même s’il n’a toujours pas assez de députés pour constituer un groupe parlementaire reconnu à l’Assemblée nationale.

Dans Jean-Talon, le PQ a pu – avec un PLQ hors-jeu – devenir une valeur refuge en étant le seul autre parti à avoir déjà formé un gouvernement.

Les gouvernements péquistes ont une liste assez impressionnante de réalisations : des centres de la petite enfance au régime d’assurance médicaments et, si on veut remonter plus loin, la loi 101 et celle sur le financement des partis politiques.

Mais les prochaines élections se joueront sur d’autres enjeux. Et le PQ de Paul St-Pierre Plamondon devra défendre son option fondamentale, la souveraineté, qui n’a pas été au cœur du débat politique depuis presque trois décennies.

Mais, à une exception près, le PQ n’a jamais réussi à gagner en faisant de la souveraineté l’enjeu d’une élection. Les divers chefs péquistes ont toujours fait campagne sur une version ou une autre du « bon gouvernement » en repoussant la question de la souveraineté pour un référendum plus tard dans le mandat.

La seule exception étant Jacques Parizeau en 1994, une élection qui arrivait dans des circonstances très favorables pour le PQ, après les échecs des accords constitutionnels du lac Meech et de Charlottetown et l’élection de 54 députés du Bloc québécois à Ottawa.

M. St-Pierre Plamondon dit vouloir jouer la transparence sur l’option fondamentale du PQ. Mais il n’est pas dit que d’ici trois ans, les pressions venant de son propre parti lui enjoignent de jouer la carte du « bon gouvernement » plutôt que la promesse d’un référendum. Tous ses prédécesseurs, sauf un, auront dû passer par là.

Québec solidaire a terminé au deuxième rang dans Jean-Talon avec presque 24 % des voix aux élections générales de 2022. À la partielle de cette année, son candidat a fini au troisième rang, avec 17,5 % des voix.

Impossible de ne pas constater qu’au mieux, QS fait du surplace ; au pire, il recule. En fait, depuis les dernières élections, le parti se cherche, et cela devrait encore être évident au congrès qui aura lieu à la fin de novembre.

En fait, QS ne s’est pas remis de la campagne électorale où certaines de ses promesses – en particulier ce que ses adversaires ont surnommé la « taxe orange » – ont changé la perception que bien des électeurs avaient du parti.

Mais Québec solidaire est un parti qui est né de la fusion de plusieurs groupes parmi les plus à gauche de la politique québécoise. Il ne veut pas être l’un de ces partis sociaux-démocrates. Il veut s’en démarquer.

Mais, ironiquement, ce qui guette QS actuellement est une sorte de « NPDisation ». Un parti qui a l’appui d’électeurs qui veulent une voix de gauche au Parlement, mais qui ne s’attendent pas à ce qu’il puisse prendre le pouvoir un jour.

Les députés de QS ne se voient évidemment pas dans ce rôle, mais c’est ce qui attend presque inévitablement un parti qui a du mal à sortir des grandes villes et à être compétitif dans les banlieues.

Le Parti conservateur du Québec a connu sa première campagne vraiment professionnelle, mais il n’a pas réussi à faire élire un seul député malgré ses 12,9 % des voix. En fait, ses appuis se sont surtout concentrés dans la grande région de la Capitale-Nationale, avec assez peu de voix dans le reste du Québec.

Mais dans Jean-Talon, sa part des suffrages a baissé de 10,5 à 6,07 % des voix. Évidemment, ce n’est pas une circonscription faite sur mesure pour le Parti conservateur, mais dans une élection partielle où les questions régionales de Québec ont, bien naturellement, pris beaucoup de place.

Mais les dernières interventions du chef conservateur, Éric Duhaime, semblent vouloir se limiter aux sujets régionaux, en particulier le troisième lien, sans vouloir se donner une véritable envergure nationale.

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