Le bureau n’est pas toujours un monde de Calinours. Il y aura inévitablement des problèmes et des journées difficiles. Pour être plus heureux, il faut toutefois parvenir à laisser les soucis au travail.

Le professeur de psychologie Marc Schulz, coauteur du livre Qu’est-ce qu’une vie heureuse ?, a d’ailleurs constaté que beaucoup de travailleurs ramènent malgré eux leurs mauvaises émotions à la maison, ce qui diminue la qualité de leurs soirées avec leur famille.

Une façon de sortir de cette « spirale de pensées contrariantes » : reconnaître et affronter ses émotions, par exemple en prenant quelques minutes pour ruminer dans le stationnement en sortant du travail ou pendant le retour à la maison, suggèrent Robert Waldinger et Marc Schulz⁠1.

PHOTO MARTIN TREMBLAY, ARCHIVES LA PRESSE

La solitude rend malheureux au travail aussi. C’est pourquoi il est suggéré d’entretenir des liens sociaux forts dans un contexte professionnel.

La solitude rend malheureux au travail aussi. C’est pourquoi il est suggéré d’entretenir des liens sociaux forts dans un contexte professionnel. Les recherches ont démontré que les employés qui ont un meilleur ami au travail se sentent plus impliqués et sont généralement plus heureux, toujours selon Robert Waldinger et Marc Schulz.1

Dans le même ordre d’idées, mieux vaut passer au moins deux jours par semaine en présence au bureau, question de ne pas être isolé à la maison. Le télétravail à temps plein, c’est peut-être plus simple pour faire le lavage, mais ça altère les liens avec nos collègues.

Rechercher l’équilibre

Les personnes qui travaillent 60, 70 ou 80 heures par semaine sont-elles heureuses ? Elles le seraient davantage si elles travaillaient moins et qu’elles avaient plus de temps à consacrer à leur famille, leurs amis et leurs loisirs. À 80 heures par semaine, le travail est probablement devenu une passion obsessive, selon Robert Vallerand, professeur de psychologie à l’UQAM.

Tu te sens bon au travail, donc tu vas surinvestir dans le travail. Le danger, c’est que tu négliges d’autres sphères de vie importantes comme la famille et les amis. C’est important d’investir dans d’autres sphères de sa vie. Les gens qui font une longue carrière dans un domaine ont généralement d’autres passions.

Robert Vallerand, professeur de psychologie à l’UQAM

L’argent rend-il heureux ?

Vous gagnez plus d’argent ? Tant mieux. Mais au-delà d’un certain seuil, ça ne vous rendra pas plus heureux.

Aux États-Unis, le bonheur augmente généralement jusqu’à un revenu de 75 000 $ US par an (revenu du ménage), parce que cet argent permet à la famille de satisfaire ses besoins les plus importants et d’avoir un certain contrôle sur sa vie. Après, le bonheur n’augmente pas vraiment, selon les études des économistes Angus Deaton et Daniel Kahneman.

Pourquoi 75 000 $ US par ménage (environ 100 000 $ CAN) ? Lors de leur étude en 2010, c’était tout près du salaire moyen d’un ménage américain – ce qui suggère qu’on a tendance à se comparer aux autres pour mesurer sa richesse.

En 2022, un ménage québécois gagnait en moyenne 95 600 $ par an (50 700 $ par personne de 16 ans et plus). On peut donc soupçonner que le bonheur cesse d’augmenter de façon importante après ce seuil.

Bref, gagner 10 000 $ de plus par an fait une énorme différence dans la vie (et le bonheur) d’une personne qui gagne 30 000 $, mais n’augmente pas le bonheur d’une personne qui gagne déjà 130 000 $⁠2.

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Et l’hérédité ?

Certaines personnes sont-elles davantage douées pour le bonheur ? Oui, en raison de leur hérédité, qui compte pour 30 % à 50 % de l’aptitude au bonheur, estiment les chercheurs. Sans surprise, les gens moins disposés génétiquement pour le bonheur sont aussi ceux qui ont plus de prédispositions pour le développement de troubles anxieux. « La bonne nouvelle, c’est que personne n’est globalement prédisposé à être malheureux », dit Simon Girard, professeur de génétique humaine à l’Université du Québec à Chicoutimi. On ne peut pas changer son bagage génétique. Mais on peut travailler sur l’autre moitié des facteurs qui nous rendent heureux. Selon les recherches de Sonja Lyubomirsky, professeure de psychologie à l’Université de Californie, 40 % de notre bonheur est attribuable à nos actions et à nos choix⁠3.

1. Dans le cadre de cet article, nous faisons entre autres référence au contenu du livre du DRobert Waldinger et de Marc Schulz, Qu’est-ce qu’une vie heureuse ? (Éditions de l’Homme, 2023)

2. Daniel Kahneman et Angus Deaton, « High Income Improves Evaluation of Life but Not Emotional Well-Being », Proceedings of the National Academy of Sciences, 107, 328, septembre 2010

3. Sonja Lyubomirsky, Kennon M. Sheldon et David Schkade, « Pursuing Happiness : The Architecture of Sustainable Change », Review of General Psychology, 9, 2, 2005