Outre des pépins techniques que l’on peut encore imputer à une période de rodage, le REM a deux gros problèmes : son monopole et sa responsabilité.

Le monopole fait partie des privilèges exorbitants qui ont été consentis par le gouvernement de Philippe Couillard à CDPQ Infra, la filiale de la Caisse de dépôt et placement qui construit le REM.

À l’époque, on cherchait un opérateur pour les voies ferrées destinées aux transports en commun sur le nouveau pont Samuel-De Champlain. Mais CDPQ Infra a exigé un monopole. Il y avait une voie réservée aux autobus sur le vieux pont, mais il n’était pas question qu’il y en ait une sur le nouveau.

Pis encore, CDPQ Infra exigeait aussi que toutes les sociétés de transport de la Rive-Sud aient l’obligation de rabattre leurs autobus sur les stations du REM pour qu’il devienne l’unique façon de traverser le fleuve en transport collectif. Des ententes secrètes qui n’ont vu la lumière que grâce à une fuite dans les médias.

Pour les économistes, un monopole est une mauvaise chose pour tout le monde, sauf pour celui qui le détient, bien entendu. Pour les usagers des transports en commun, c’est tout aussi vrai.

Pour beaucoup de gens, l’obligation de rabattage signifie des délais supplémentaires qui font en sorte qu’ils préféreront continuer à utiliser leur voiture.

Même pour les usagers du REM, le monopole est une mauvaise chose. Parce qu’il n’y a plus d’autres options si le REM est en panne. Sauf d’attendre les autobus qui doivent se déployer en urgence, ce qui n’est pas toujours simple, comme on l’a vu récemment.

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, ARCHIVES LA PRESSE

La chute de glace sur les voies qui traversent le pont Champlain a récemment forcé une énième interruption de service du REM.

Quand on voit tout cela, on ne s’étonne pas tellement de lire dans les journaux que des usagers des transports en commun ont décidé de s’acheter une auto, tant le service du REM n’est pas à la hauteur de leurs attentes.

L’autre problème est celui de la responsabilisation. Pratiquement depuis le début des travaux, CDPQ Infra a refusé d’assumer ses responsabilités et a jeté le blâme sur tout le monde sauf elle.

Dans deux entrevues surréalistes aux émissions du matin, lundi, le PDG de CDPQ Infra, Jean-Marc Arbaud, jetait les blâmes à tout vent. « Nous ne sommes pas satisfaits de la performance de nos sous-traitants », a-t-il soutenu au micro de Paul Arcand.

Mais qui a choisi, fait signer des contrats et payé les sous-traitants, sinon CDPQ Infra ? Alors, qui doit donc être responsable, sinon CDPQ Infra ?

Un exemple : le déneigement. Dans la plupart des municipalités du Québec, il est effectué par des sous-traitants. Mais s’il y a cafouillage, qui devra aller s’expliquer ? Le maire ou la mairesse, bien entendu. Le même standard devrait s’appliquer à CDPQ Infra.

Dans cette même entrevue, M. Arbaud blâmait l’Autorité régionale de transport métropolitain de n’avoir pas pu lui fournir les autobus au pied levé après une panne du REM et tenait le Groupe Signature sur le Saint-Laurent (SSL), qui gère le pont Champlain, responsable d’un autre arrêt de service, qui aurait été causé par une opération de déglaçage imprévue.

Sauf que SSL soutient qu’aucune manœuvre manuelle de déglaçage n’a eu lieu ce jour-là. Le verglas, formé à la suite de la pluie verglaçante tombée plus tôt, s’est simplement mis à fondre. Une cause naturelle, donc, qui peut se produire régulièrement en hiver.

Voilà pour le REM – ou plutôt le petit bout de REM qui est déjà en service. Pour le reste du projet à Montréal, on constate que les retards sont importants, en particulier pour la desserte de l’aéroport Montréal-Trudeau, qui ne sera prête qu’en 2027.

Mais il faut aussi se poser des questions sur l’utilité réelle de CDPQ Infra dans les autres missions qui lui ont été confiées par le gouvernement du Québec pour d’autres projets de transports en commun.

On apprenait lundi soir que CDPQ Infra se retirait tout simplement du projet de transports en commun structurant sur la Rive-Sud de Montréal dont elle avait le mandat depuis plus de trois ans.

En fait, on a appris des mairesses de Longueuil et de Brossard, Catherine Fournier et Doreen Assaad, que CDPQ Infra s’était retirée du projet de REM sur le tracé du boulevard Taschereau.

En fait, après trois années où les mairesses ont expliqué qu’elles ne voulaient pas d’un REM en hauteur sur piliers de béton, comme ce qui est actuellement en service ou en construction, c’était toujours la seule et unique option que leur offrait CDPQ Infra.

Bref, CDPQ Infra n’a qu’un seul produit à vendre, le REM tel qu’il est actuellement. Si les villes ont d’autres visions, elle se retirera tout simplement. C’est à prendre ou à laisser.

Toujours cette même mouture du REM avait été proposée pour l’est de Montréal avant d’être abandonnée « parce que c’était un projet qui s’en allait dans le mur », selon l’expression de la mairesse Valérie Plante.

Il ne reste qu’à espérer que CDPQ Infra ne proposera pas la même chose à la Ville de Québec en lieu et place du tramway.

Appel à tous

Les pannes du REM se sont multipliées ces derniers temps. Vous êtes un utilisateur assidu du métro léger ? Nous aimerions connaître vos stratégies pour éviter les retards dans vos déplacements. Prenez-vous plus souvent votre voiture ou le métro à la station Longueuil ? Travaillez-vous plus souvent de la maison ?

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