Le premier ministre Legault s’est demandé dernièrement à quoi servait le Bloc québécois à Ottawa. Il en a parlé comme d’autres dénonçaient jadis le Reform Party.

On est restés plantés là, comme des poireaux, abasourdis à l’entendre tonitruer contre ce parti politique, alors que 30 % des partisans de la CAQ, ceux qui lui restent, favorisent en même temps le Bloc au fédéral, selon la firme Léger⁠1.

On croyait rêver, comme s’il avait les moyens de perdre des amis. Une chire insaisissable. Quand un gars est au-dessus de ses affaires…

À moins qu’on ne comprenne ni du cul ni de la tête, et que la CAQ veuille devenir la référence fédéraliste au Québec ? Misère !

Monsieur Legault a dit publiquement qu’il cherchait une boussole. En tout cas, il n’a pas trouvé l’altimètre qui lui permettra de mesurer l’élévation dont il a besoin pour retrouver le nord.

À moins qu’il ne cherche le nord magnétique, pour compenser le fait qu’il aurait perdu le sien, son magnétisme. En effet, il n’attire plus comme l’aimant qu’il a déjà été.

Dans l’état actuel des choses, les Québécois pourraient même se demander : « À quoi ça sert, la CAQ ? », en observant ce gouvernement tenter de nous recycler ses trucs de diversion politique pour se sortir de la mélasse, comme l’immigration, à répétition, le fédéral, en général.

La nouvelle toune étant, dans ce dernier cas, le manque d’impartialité des juges nommés par Ottawa, rien que ça !

Litanique, comme un vieux vinyle qui saute et hoquette.

Et je vous épargne la nouvelle consultation bidon sur la mobilité et le troisième lien dans la région de Québec, où on considère encore une fois ces provinciaux comme une collection de parfaits péquenauds.

Oui, on comprend pour l’immigration, mais on voudrait croire que le gouvernement est encore capable d’en débattre autrement que pour faire des gains partisans.

PHOTO ROBERT SKINNER, ARCHIVES LA PRESSE

Le premier ministre François Legault

Monsieur Legault réussit encore à nous souffler avec ses nouveaux dérapages non contrôlés. Spectaculaire !

L’adage dit que si on ne peut pas aider, on essaie de ne pas nuire. Et ne pas nuire, c’est peut-être aussi de ne pas se mêler de nos choix politiques au fédéral, de s’occuper de son jardin et de sa ménagerie.

Il devrait se rappeler que la dernière fois où il a tenté le coup, celle où il nous a appelés à voter pour le chef conservateur, le pétillant Erin O’Toole, celui qui avait « un plan », il a fait complètement patate. Pire, il a nui au Québec.

Ainsi, on est majeurs et vaccinés et on devrait être capables de se faire une tête pas pire le temps venu.

À propos, si quelqu’un sait où s’en va Justin Trudeau, j’aimerais franchement qu’il m’en informe, moi, je m’y perds. Cet homme semble vivre politiquement dans l’irréalité, sur une exoplanète que seul le regretté Hubert Reeves devait connaître.

Diriger le Canada ne découle pas d’un droit divin. Justin étire l’élastique de l’inertie présentement, on le sent en K.-O. technique, atonique, ne réalisant pas que le Bluetooth ne fonctionne plus entre les Canadiens et lui.

Mais il veut rester…

On a beau ne pas aimer Pierre Poilievre, il a pour le moment l’ouest du pays dans sa petite poche d’en arrière, et pourrait, au final, avoir à l’usure les habitants de l’est du Canada, de Kenora, en Ontario, à St. John’s, à Terre-Neuve.

Il existe un tel phénomène qui s’appelle la banalisation et ça fonctionne aussi en politique.

Monsieur Poilievre est un énergique, qui émet à répétition des inepties pour faire le plein du même genre de clientèle qui fait la fortune de Trump, au sud.

PHOTO BLAIR GABLE, ARCHIVES REUTERS

Le chef conservateur Pierre Poilievre, à Ottawa

Mais admettons qu’il soit capable de se calmer, éventuellement, et réussisse à faire oublier à plusieurs ses bêtises passées.

Admettons qu’il arrive au Québec, et ailleurs, avec quelques plans qui aient de l’allure, au lieu de seulement diaboliser Justin Trudeau. Il y a des chances que la banalisation s’opère et qu’une nouvelle clientèle d’électeurs, qui oublierait ses frasques, adhère, faute de mieux.

On sent, parmi ceux au Québec qui souhaitent participer au choix du prochain gouvernement, qu’ils pourraient faire le pas et voter Poilievre.

Ce qui serait entre autres regrettable pour des élus libéraux talentueux comme François-Philippe Champagne, Mélanie Joly, Pablo Rodriguez ou Pascale St-Onge, qui risquent, au mieux, de se décomposer dans l’opposition.

On aurait le goût de les inviter à prendre la direction du Parti libéral du Québec, où ils auraient la chance de devenir un jour premier ministre du Québec.

Tout ça pour finir par dire que le Bloc québécois reste utile en constituant une planque politique pour les Québécois, surtout si Justin ne se réveille pas bientôt et s’il nous reste de la mémoire concernant l’accumulation d’âneries émises par monsieur Poilievre.

Son chef, Yves-François Blanchet, est respecté et pertinent, d’où, justement, l’incompréhension de l’attaque du premier ministre.

Alors, c’est à ça que ça sert, le Bloc québécois, Monsieur Legault !

À ne pas s’en souvenir, le PM risque de continuer à faire le vide politique autour de lui et il risque que son parti tombe entre deux chaises pour de bon, se faisant rogner les deux ailes, par le PQ d’un côté, et peut-être par les libéraux provinciaux de l’autre, s’ils se trouvent un chef qui a un semblant de bon sens.

Entre nous

Rencontrer Brian Mulroney ou l’avoir au bout du fil était un bonheur. Il me reste comme impression une figure paternelle et la bienveillance du mentor. Philosophiquement conservateur, mais pas d’un conservatisme obtus, un chef d’État courageux, comme il y en a peu aujourd’hui.

Le genre de gars à t’appeler, juste avant de quitter la mairie, pour te donner des conseils, qui furent les meilleurs et que j’ai suivis à la lettre. Il m’avait raconté il y a quelques mois combattre un maudit cancer que je connais trop bien.

Il avait rencontré les plus grands du monde à son époque, mais se souvenait du nom de mon oncle Cyrille, entrepreneur et camionneur à Sept-Îles. Ça dit tout de l’homme !

1. Lisez un article du Journal de Montréal sur le sondage Léger Qu’en pensez-vous ? Participez au dialogue