Lettre ouverte à Christopher Lindsay, directeur général de Boxe Canada 

Monsieur le Directeur,

Nous vous écrivons en prévision de la Coupe de Brampton prévue le 1er février pour discuter des implications des valeurs d’équité, de diversité et d’inclusion (EDI) dans le sport amateur féminin et plus précisément dans la boxe.

L’adoption de ces valeurs soulève des débats délicats. Par exemple, au nom de l’inclusion, la nageuse Lia Catherine Thomas, une personne née homme biologique, mais transidentifiée femme, a été autorisée à concourir dans des épreuves féminines de natation et a remporté la médaille d’or, et ce, malgré de piètres performances antérieures dans les catégories masculines (65e rang). Par contraste, la Fédération internationale d’athlétisme a choisi d’exclure les athlètes transgenres des catégories féminines ayant connu une puberté masculine, jugeant leur avantage biologique inéquitable⁠1.

PHOTO FOURNIE PAR KATIA BISSONNETTE

La boxeuse Katia Bissonnette s’est retirée d’un combat quand elle a appris que son adversaire serait une femme née avec des caractères sexuels primaires masculins.

Ce débat a également touché la boxe en octobre dernier. Le match annulé entre les boxeuses Katia Bissonnette et Mya Walmsley a fait couler beaucoup d’encre⁠2, et pas seulement dans le monde de la boxe.

Bissonnette s’est retirée du match lorsqu’elle a appris à la dernière minute que son adversaire était en fait un homme biologique.

Elle craignait à juste titre pour sa sécurité, n’ayant aucune information sur son adversaire : quel était son taux de testostérone ? Y avait-il même eu une chirurgie de réassignation sexuelle ? Les organisateurs du tournoi ont dissimulé toutes ces informations critiques.

Un message à Boxe Canada

Mauricio Sulaiman, président de la Fédération internationale de boxe anglaise (World Boxing Council), a honoré Bissonnette avec une médaille d’or honorifique, en reconnaissance de sa sage décision. Il est clair que, par cette récompense, World Boxing Council adressait un message également à Boxe Canada.

Nous ne vous apprendrons pas que l’équité est une valeur importante au sein de la boxe amateur. C’est pourquoi il existe plusieurs catégories de boxeurs basées sur leur poids. Ainsi, on admet implicitement qu’il serait inéquitable d’opposer un poids lourd à un poids plume.

Or, opposer un homme biologique à une femme biologique dans un match de boxe soulève un enjeu d’équité tout aussi pertinent.

Il ne s’agit pas simplement alors d’un problème de justice, comme pour la natation et l’athlétisme, mais aussi carrément de la sécurité de la boxeuse.

Évidemment, il serait complètement irresponsable d’autoriser un homme à concourir dans la catégorie féminine sur la seule base de son ressenti. Donc, une transition de genre est obligatoire, mais n’est pas suffisante. Le taux de testostérone est certainement aussi pertinent que le poids⁠3, mais ce n’est pas tout. En effet, la prise d’hormones féminines n’annule pas rétroactivement tous les attributs masculins qui confèrent à l’homme un avantage injuste dans un combat contre une femme. La science démontre notamment que la sélection naturelle a nettement favorisé les hommes pour la puissance et la physiologie de leurs poings⁠4. Nous vous rappelons que le sexe n’est pas une construction sociale, mais une réalité biologique immuable qui provient des rôles bien distincts que jouaient hommes et femmes à l’époque paléolithique. Évidemment, nos mœurs ont bien changé depuis, mais notre génétique, elle, est demeurée essentiellement la même.

L’argument de Walmsley, selon lequel la mesure de la testostérone serait « intrusive », est au mieux loufoque. En effet, les tests de dopage sont la norme depuis longtemps et ils ne sont pas moins intrusifs pour autant. Depuis quand se fie-t-on à la bonne foi des athlètes ?

Il est donc impératif que Boxe Canada établisse des critères clairs et justes pour la participation des athlètes transgenres et les communique aux autres boxeuses afin qu’elles évaluent bien les risques qu’elles encourent. Cette organisation doit garder à l’esprit que si ses critères sont trop permissifs, on risque de voir plusieurs femmes déserter ce sport.

En attendant, il est essentiel pour vous d’identifier clairement les athlètes transgenres pour que les autres boxeuses puissent prendre des décisions éclairées. Comprenez bien qu’à défaut de vous acquitter de cette obligation fondamentale, et advenant une blessure mortelle, vous pourriez être accusés de négligence ayant causé la mort (article 220 du Code criminel).

Nous espérons que vous prendrez en considération ces points cruciaux pour la sécurité et l’équité dans votre sport d’ici le prochain tournoi.

Cosignataires : Michèle Sirois, anthropologue, présidente PDF Québec ; Normand Baillargeon, Ph. D. ; Marie-Claude Girard, ret. Commission canadienne des droits de la personne ; François Chapleau, professeur émérite, Université d’Ottawa ; Yvon Dallaire, M. Ps. ; Andréa Richard, auteure ; Louise Mailloux, Ph. D. ; Michel Belley, président des Sceptiques du Québec ; Annie-Ève Collin, M. Phil. ; Michel Virard, ingénieur ; Michel Pion, VP, Humanistes du Québec ; Francine Boucher, M. Ps. ; Lyne Jubinville, B. Sc. ; Pierre Cloutier, membre fondateur des Sceptiques et des Humanistes du Québec ; Monique Parent, auteure ; Yves Rocheleau, ex-député de Trois-Rivières ; Nadia Alexan, M. Litt. ; Martine Michaud, M. A., et Daniel Dulude, militant féministe

1. Lisez « Les personnes transgenres bannies des compétitions féminines d’athlétisme » sur le site de Radio-Canada 2. Lisez la chronique « L’autre combat de Katia et de Mya » d’Isabelle Hachey 3. Lisez l’article « Serum androgen levels and their relation to performance in track and field » (en anglais) 4. Lisez l’article « Sexual dimorphism in human arm power and force : implications for sexual selection on fighting ability » (en anglais) Qu’en pensez-vous ? Participez au dialogue