Le premier ministre égyptien Essam Charaf a jugé jeudi que le traité de paix signé en 1979 avec Israël, le premier ratifié entre l'État hébreu et un pays arabe, n'était pas «sacré», au moment où les relations entre les deux pays connaissent une période de tensions.

Ce traité de paix «n'est pas quelque chose de sacré et il peut subir des changements», a déclaré M. Charaf dans un entretien avec une télévision turque, selon des propos rapportés par l'agence officielle égyptienne Mena.

«Le traité de Camp David peut toujours être discuté ou modifié dans l'intérêt de la région ou tout simplement de la paix», a ajouté le chef du gouvernement égyptien.

Ces déclarations surviennent après une visite au Caire du premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan, mardi et mercredi, où il s'est fait le héraut de la cause palestinienne et a une nouvelle fois attaqué l'État hébreu avec virulence.

Interrogé sur la pertinence du choix de cette semaine pour le voyage en Égypte de M. Erdogan, alors que les relations entre Ankara et l'État hébreu se sont également dégradées, M. Charaf a affirmé: «La visite de M. Erdogan est intervenue à un moment délicat puisque de véritables changements sont en train d'avoir lieu au Moyen-Orient».

«Nous devons nous occuper de la racine du problème et le problème au Moyen-Orient, c'est l'occupation israélienne de la terre palestinienne», a-t-il poursuivi.

Ces déclarations surviennent sur fond de tensions entre l'État hébreu et l'Égypte après notamment que l'ambassade d'Israël au Caire, symbole de la paix conclue il y a plus de trente ans, mais qui cristallise aussi la colère d'une partie de l'opinion égyptienne, a été attaquée vendredi soir lors d'une violente manifestation.

Trois personnes ont été tuées et un millier d'autres blessées dans les affrontements avec les forces de l'ordre qui ont accompagné cette attaque. L'ambassadeur d'Israël en Égypte a dû rentrer précipitamment dans son pays.

Le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu avait quant à lui cherché à minimiser la portée de cette attaque pour les relations bilatérales, affirmant samedi que «nous sommes engagés à préserver la paix avec l'Égypte, ce qui est dans l'intérêt de l'Égypte et d'Israël».

Les relations entre les deux pays traversaient déjà une crise grave après la mort de cinq policiers égyptiens, tués le 18 août alors que l'armée israélienne poursuivait des auteurs présumés d'attaques dans le secteur d'Eilat, près de la frontière avec l'Égypte. Un sixième policier, blessé, est décédé ces derniers jours.

M. Charaf est revenu sur cette affaire dans son interview, en soulignant que le fait que des policiers égyptiens aient été «tués par Israël sur le territoire égyptien a atteint tous les Égyptiens dans leur fierté».

Les militants qui ont provoqué en février la chute du président Hosni Moubarak réclament une révision du traité de paix. L'influent mouvement des Frères musulmans a lui aussi déclaré vouloir une révision de ce traité, sans évoquer sa rupture.

L'armée aujourd'hui au pouvoir en Égypte a affirmé à plusieurs reprises son attachement aux pactes internationaux conclus par le passé, qui comprennent les accords de paix signés du temps du président Anouar el-Sadate.

La communauté internationale, tout particulièrement les États-Unis qui avaient parrainé ces accords historiques, avaient insisté, après la démission de M. Moubarak le 11 février, pour que Le Caire donne des assurances qu'ils seraient respectés.