L'opposition politique au Sénégal, le collectif de jeunes «Y'en a marre» et le chanteur Youssou N'Dour ont appelé jeudi à voter Macky Sall au second tour de la présidentielle au Sénégal, face au chef d'État sortant Abdoulaye Wade, 85 ans, dont 12 au pouvoir.

Le gouvernement a dans le même temps vivement critiqué «l'ingérence» des observateurs de l'Union européenne (UE) lors du premier tour du 26 février, menaçant de revoir sa collaboration avec eux pour le second tour le 18 ou le 25 mars.

«Il faut qu'on se mobilise tous et qu'ensemble, on porte l'estocade finale, pour en finir avec ce régime», a déclaré jeudi Alioune Tine, coordinateur du Mouvement du 23 juin (M23, opposition et société civile).

«Nous demandons aux candidats du M23 de faire preuve de patriotisme politique, de taire leurs problèmes personnels pour l'intérêt supérieur du Sénégal» en soutenant Macky Sall «qui est le seul à pouvoir (...) empêcher Wade d'avoir un troisième mandat», a-t-il ajouté.

Abdoulaye Wade, candidat contesté par l'opposition, est arrivé en tête du premier tour le 26 février avec 34,82 % des suffrages, contre 26,57 % à Macky Sall, son ancien Premier ministre passé dans l'opposition, selon des chiffres officiels publiés mercredi.

La plupart des autres candidats à l'élection étaient, comme Macky Sall, membres du M23.

L'ancien Premier ministre a aussi reçu le soutien du célèbre chanteur Youssou N'Dour, dont la candidature à la présidentielle avait été rejetée par le Conseil constitutionnel et qui a promis de «battre campagne» pour Macky Sall.

«Les Sénégalais ont voté à près de 70 % contre le pouvoir. Le changement est déjà là, ce n'est plus qu'une affaire de modalité», a déclaré Youssou Ndour après un entretien avec Macky Sall.

Macky Sall, qui a rappelé sa «longue amitié» avec Youssou N'Dour, s'est félicité de ce soutien «pour aider à réaliser l'alternance démocratique pacifique», et a demandé au chanteur «d'offrir un méga concert le 4 avril» (jour de l'Indépendance, ndlr), après la «victoire».

Wade a perdu un million de voix

Le collectif de jeunes «Y'en a marre», en pointe contre la candidature de Wade et très populaire dans les banlieues dakaroises, a également appelé jeudi à voter massivement pour Macky Sall.

«Dans l'arène, quand tu combats un adversaire et qu'il est (...) presque à terre, il faut l'achever, il ne faut pas lui laisser le temps de se rebiffer», a lancé Thiat, le nom de scène du rappeur Cyrill Touré, un des fondateurs du mouvement.

La presse soulignait jeudi la difficile tâche d'Abdoulaye Wade, qui a perdu un million de suffrages par rapport à son élection au premier tour en 2007 (1 914 043 voix) et qui ne dispose a priori pas de réserves de voix.

Il se voit obligé de changer de stratégie dans l'urgence, alors qu'il s'était déclaré sûr de l'emporter dès le premier tour.

Il va notamment devoir séduire les abstentionnistes: la participation s'est élevée à 51,58 %, en nette baisse par rapport aux 70 % de la présidentielle de 2007.

Le M23 a appelé à un rassemblement samedi à Dakar, «en hommage au peuple sénégalais et aux martyrs», en référence aux victimes des violences préélectorales qui ont fait en un mois de 6 à 15 morts selon les sources.

Le gouvernement s'en est par ailleurs pris à la mission d'observation de l'Union européenne accusée d'«ingérence» et de «dénonciations non fondées», menaçant de revenir sur sa «collaboration» pour le second tour de l'élection.

«Vous vous marginalisez par une attitude peu élégante avec une posture de donneur de leçon», a réagi jeudi le ministre chargé des élections, Cheikh Gueye, dans une lettre au chef de la mission de l'UE.

Cette mission avait notamment critiqué «l'interdiction des manifestations» à Dakar pendant la campagne et «le manque de transparence» dans la distribution et le retrait des cartes électorales.