(Caracas) Pleurs de joie, cris, applaudissements… Cent-quinze immigrés vénézuéliens, dont certains étaient bloqués depuis deux semaines à la frontière entre le Chili et le Pérou, sont arrivés dimanche à Caracas dans un avion affrété par les autorités.

Ces migrants avaient décidé de quitter le Chili en raison d’un durcissement des contrôles, mais aussi des conditions économiques plus difficiles.

« Je ne quitterai plus jamais le pays. À l’étranger, on nous traite pratiquement comme des chiens. On était bloqué 14 jours, [les agences onusiennes de défense] des “Droits de l’homme” sont arrivés le 10e jour. On avait rien, pas de toilettes… Et la police péruvienne ne nous donnait aucune information », raconte Gerardo Valladares, 22 ans.

Depuis plus de deux semaines, des centaines de migrants, principalement des Vénézuéliens, mais aussi des Haïtiens, des Colombiens ou des Équatoriens, sont bloqués à la frontière nord du Chili. Le Pérou les empêche de passer, invoquant l’absence de documents.

Le Pérou a décrété un état d’urgence de 60 jours à ses frontières et ordonné le déploiement de personnel militaire pour renforcer la surveillance et lutter contre l’insécurité liée aux étrangers, selon la présidente péruvienne Dina Boluarte.  

« La vérité c’est qu’il n’y a rien d’humain dans ce qui était en train de se passer […], mais grâce à Dieu nous sommes là », affirme Jani Medina, 19 ans, bébé dans les bras.

« Ce premier vol de Vénézuéliens retournant dans leur pays d’origine est un triomphe diplomatique et un triomphe du dialogue et de ceux d’entre nous qui cherchent des solutions », a déclaré le président chilien Gabriel Boric.

Le ministère des Affaires étrangères vénézuélien s’est lui félicité du rapatriement dans le cadre du plan « Retour à la patrie », lancé par les autorités en 2018 et qui a vu le retour de 30 000 Vénézuéliens.

« Au moins il y a la famille »

Quelque 7,2 des 30 millions de Vénézuéliens ont quitté le pays en raison de la grave crise politique et économique qui a vu le PIB se réduire d’environ 80 % entre 2013 et 2022.

Ce vol, parti de la ville d’Arica, à quelque 2000 km au nord de Santiago, a quitté le Chili vers 5 h 40 heure locale (5 h 40 heure de l’Est) et a atterri à 13 h au Venezuela.

Les migrants ont été accueillis à l’aéroport par des agents du ministère des Affaires étrangères. Ils ont reçu des plateaux-repas et des boissons.  

Ceux qui avaient des proches qui les attendaient ont rapidement quitté les lieux tandis que les autres ont été acheminés par des bus de l’aéroport à la gare routière de la Bandera de Caracas, d’où ils pouvaient prendre des véhicules pour rejoindre leurs villes ou villages.

 « Je suis très heureuse d’être de retour », affirme Juri Gil, styliste, 38 ans, marié, un enfant. Elle avait vendu beaucoup de choses pour financer son émigration, mais revient 5 mois plus tard à peine.  

 « On a perdu beaucoup d’argent [dans cette aventure]. Le Chili ne va pas bien économiquement. Si c’est pour être dans un pays qui est dans la même situation que le Venezuela ou pire, la meilleure chose à faire est de rentrer chez soi. Au moins, il y a la famille », dit-elle, évoquant les difficultés à la frontière chilo-péruvienne.  

 « Nous avons improvisé des tentes. Nous y avons survécu pendant 11 jours. À même le sol, dans les moustiques, dans le froid, dans la chaleur, ce n’était pas facile. Entre les poubelles », raconte Juri, qui précise que les Chiliens les ont « beaucoup aidés » fournissant eau et nourriture.  

Michell Ramirez se dit elle aussi « soulagée » d’être de retour. « Nous sommes trois, moi et les deux enfants. Ou plutôt cinq avec les animaux » : un chien et un chat, « Tom et Kittty ». Michell a passé plus de 10 ans à l’étranger et un de ses enfants âgés de 7 ans, n’a jamais connu son pays. « Maintenant, je veux retrouver les miens ».