La sévérité des règles mises en place par le gouvernement français en matière d'immigration et de sécurité, qui alimente une vive controverse dans le pays, suscite l'inquiétude des Nations unies.

Réunis à Genève pour leur session semestrielle, les membres du Comité pour l'élimination de la discrimination raciale, qui notent une «recrudescence notable du racisme et de la xénophobie» dans l'Hexagone, ont fait part de leurs préoccupations à la délégation française.

Plusieurs ont évoqué les mesures annoncées dans les dernières semaines par le président Sarkozy à l'appui de leurs critiques.

Un expert turc a dénoncé la volonté du chef d'État de retirer la nationalité française à certains criminels «d'origine étrangère», arguant qu'une telle mesure contreviendrait probablement à la Constitution.

Un autre expert cité par l'AFP a critiqué le fait que les Tsiganes doivent posséder un carnet de circulation, ce qui rappelle, selon lui, «l'époque de Pétain».

Le rapporteur américain du comité, Pierre-Richard Prosper, a déclaré pour sa part qu'il manque à la France une «vraie volonté politique» de venir à bout du racisme.

Réagissant aux critiques, le secrétaire d'État français aux Affaires européennes, Pierre Lellouche, a déclaré hier que les polémiques entretenues «ici et là» au sujet des décisions du gouvernement français «n'ont pas lieu d'être», car ces décisions visent à garantir les libertés publiques.

«La France est un État de droit rigoureusement respectueux des droits de l'homme, dont elle a été la première inspiratrice depuis deux siècles», a déclaré M. Lellouche, qui désigne la sécurité comme «le premier» de ces droits.

Le président du Conseil représentatif des associations noires de France, Patrick Lozès, croit pour sa part que l'étiquette de «pays des droits de l'homme» ne colle plus à la France puisqu'elle est «régulièrement montrée du doigt et même condamnée par des organismes (internationaux) qu'elle a souvent contribué à mettre en place».

M. Lozès rappelle que la Commission européenne contre le racisme et l'intolérance (CERI) a aussi durement critiqué la situation du pays dans un rapport rendu en juin. Elle a notamment déploré que des propos tenus par des membres du gouvernement dans le cadre du débat sur l'identité nationale «aient été ressentis comme encourageant l'expression du racisme».

Les critiques émanant des Nations unies vont donner de nouvelles cartouches aux adversaires du gouvernement et du président.

L'eurodéputée Eva Joly, dans une entrevue à Paris Match, a reproché au chef d'État de désigner des «boucs émissaires» par ses mesures sécuritaires. «C'est très fasciste. Mais cela va lui coûter cher», a-t-elle prévenu.