Le Canada impose dès maintenant des sanctions économiques au régime syrien, dont les mesures de répression contre les manifestants antigouvernementaux représentent une «transgression grave à la paix mondiale».

Le nouveau ministre des Affaires étrangères, John Baird, a annoncé mardi après-midi l'imposition de mesures qui entreront en vigueur immédiatement.

Celles-ci cibleront le régime syrien et ses proches et n'ont pas pour objectif de pénaliser le peuple du pays arabe, a insisté le ministre, qui a été assigné aux affaires étrangères la semaine dernière, à la suite de l'élection fédérale.

«Le peuple syrien a exprimé son clair désir pour un système de gouvernement plus transparent. Leur appel pour une société plus démocratique a été entendu», a-t-il plaidé à l'occasion de son premier point de presse comme chef de la diplomatie canadienne.

La communauté internationale ne restera «pas les bras croisés» et le Canada non plus, a insisté M. Baird.

«Nous prenons ces mesures en raison du refus inébranlable et continu du régime à mettre fin à sa répression violente des manifestants pacifiques, et la menace que cela pose pour la région. Cette odieuse répression doit cesser», a-t-il soutenu.

Dès mardi, donc, les sanctions - imposées en vertu de la Loi sur les mesures économiques spéciales - empêcheront les dirigeants de la Syrie et leurs proches de séjourner au Canada et entraîneront un gel de leurs avoirs.

Ottawa interdira également les échanges commerciaux entre les deux pays de marchandises comme les armes, les munitions ainsi que les articles nucléaires et militaires qui peuvent être utilisés par les forces armées ou la police syriennes.

Ces mesures sont surtout symboliques, puisque le Canada n'exporte qu'environ 60 millions $ annuellement vers le pays du Moyen-Orient et reçoit moins du dixième de ce montant en importations.

Avec ces sanctions, Ottawa a en outre suspendu les initiatives et les accords de coopération bilatéraux avec la Syrie.

«Les sanctions annoncées aujourd'hui sont un rejet de la violation flagrante par la Syrie de ses obligations internationales à l'égard des droits de la personne qui menace la sécurité de tout le Moyen-Orient», a pour sa part défendu le premier ministre Stephen Harper, par voie de communiqué.

«La meilleure façon d'assurer la paix et la sécurité en Syrie est d'engager une réforme démocratique et de respecter les droits de la personne, et non d'exercer une répression violente», a-t-il tranché.

La décision d'Ottawa de sévir à son tour contre le régime de Bachar el-Assad est survenue à la suite d'une rencontre d'un nouveau comité du cabinet des ministres sur la sécurité nationale, présidé par M. Harper lui-même et auquel siègent M. Baird et son collègue de la Défense nationale, Peter MacKay, entre autres.

Des groupes de défense des droits de la personne estiment que quelque 1000 manifestants syriens auraient été tués dans les soulèvements qui déchirent le pays arabe depuis la mi-mars. Des centaines d'autres auraient été blessés et des milliers arrêtés, selon le ministre Baird.

L'Union européenne et les États-Unis ont déjà imposé une série de sanctions au président Bachar el-Assad et à des ministres syriens.

Le Canada tente ainsi de suivre la cadence, à quelques jours du Sommet du G8 qui se tiendra à la fin de la semaine en France.

Jack Layton, le leader du Nouveau Parti démocratique qui est devenu chef de l'opposition officielle à l'issue du scrutin fédéral du 2 mai dernier, avait quant à lui déjà donné son appui à l'imposition de sanctions semblables à celles adoptées par des alliés du Canada contre la Syrie.

Le ministre des Affaires étrangères a indiqué que le comité de ministres n'avait pas discuté de sanctions plus sévères à l'égard de la Syrie, notamment d'une campagne militaire comme celle que mène l'OTAN pour imposer une zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Libye afin de protéger les manifestants d'attaques aériennes par leur gouvernement.

Des groupes de défense des droits de la personne ont dénoncé le fait que la communauté internationale ait tardée à agir pour répondre aux violences qui sévissent en Syrie.

Le ministre Baird a rétorqué que le gouvernement canadien avait été aux prises avec une élection générale et que le nouveau gouvernement venait à peine de reprendre son travail. Le conseil des ministres n'a été nommé que la semaine dernière et après seulement quelques jours il était prêt à faire une annonce, a-t-il défendu.

Fin février, Ottawa avait annoncé des sanctions semblables contre le régime de Mouammar Khadafi en Libye, qui avait lui aussi sévèrement réprimé les soulèvements populaires dans son pays.