(Los Angeles) Trois ans après être devenu le premier État américain à dépénaliser toutes les drogues, l’Oregon va repénaliser la possession de petites quantités de stupéfiants à partir de septembre.

Tina Kotek, la gouverneure démocrate de cet État de l’Ouest des États-Unis, a promulgué lundi une loi actant ce rétropédalage.

À compter du 1er septembre, posséder des drogues dures (fentanyl, héroïne, cocaïne, ecstasy, etc.) sera de nouveau considéré comme un délit, passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à six mois.  

Le texte met ainsi fin à la dépénalisation votée par référendum et appliquée depuis début 2021 : les usagers en possession de petites quantités de drogues écopaient d’une simple amende de 100 dollars, tandis que la vente et la production restaient passibles de poursuites.

Pionnière aux États-Unis, cette réforme a fait beaucoup de bruit. L’idée était de traiter les usagers de drogues comme des malades plutôt que comme des délinquants, en s’inspirant du Portugal, où la dépénalisation a réussi depuis plus de 20 ans.

PHOTO JENNY KANE, ASSOCIATED PRESS

Tina Kotek, la gouverneure démocrate de cet État de l’Ouest des États-Unis, a promulgué lundi une loi actant ce rétropédalage.

Mais l’application de la loi a coïncidé avec la crise sanitaire provoquée par le fentanyl dans tous les États-Unis : les overdoses mortelles ont plus que triplé dans l’Oregon entre 2019 et 2022, principalement à cause de cet opioïde meurtrier, jusqu’à 50 fois plus puissant que l’héroïne.

L’Oregon a également énormément tardé à mettre en place les services de santé nécessaires pour accueillir les consommateurs, ce qui a rendu la consommation de drogues très visible dans les rues.

Cela a provoqué un retournement dans l’opinion publique de cet État acquis à la gauche américaine : les détracteurs de la dépénalisation ont proclamé son échec, tandis que de nombreux professionnels de santé ont souligné que le volet sanitaire de la loi n’avait pas vraiment pu être mis en place.

La Drug Policy Alliance, l’une des principales organisations qui avaient milité pour la dépénalisation, a dénoncé un « retour en arrière néfaste » mardi dans un communiqué.

« Il s’agit d’une fausse promesse de changement qui fera passer les gens par le système juridique pénal, sans qu’il y ait de lien significatif vers un traitement », a estimé sa présidente Kassandra Frederique.

La dépénalisation a limité les incarcérations et les obstacles à la réinsertion des usagers, a-t-elle rappelé.

La nouvelle loi adoptée par l’Oregon prévoit que la police continue à privilégier les alternatives aux poursuites pénales, lorsque cela est possible. Elle compte aussi renforcer la collaboration entre les forces de l’ordre et les services de santé.

Le texte couvre « un ensemble de mesures qui favorisent le traitement en premier lieu, tout en équilibrant le besoin de responsabilité », a souligné la gouverneure Tina Kotek dans une lettre annonçant la promulgation de la loi.