Pendant sept ans, le collège Sainte-Anne s’est penché sur les moyens de redéfinir ses méthodes d’enseignement afin de faire de ses cinq établissements des lieux d’apprentissage d’avant-garde. Le nouveau pavillon de son école secondaire de Dorval accueillait une première cohorte à la rentrée de 2022.

Il est le fruit d’une ambitieuse réflexion menée par Ugo Cavenaghi, directeur général du collège Sainte-Anne, et Isabelle Senécal, alors directrice de l’innovation pédagogique. « On voulait des espaces polyvalents, de la luminosité, une ouverture sur l’extérieur », énumère celle qui dirige désormais l’école. Le résultat est stimulant.

Conçu par l’architecte Pierre Thibault et Architecture 49, le bâtiment zéro carbone s’inspire d’établissements islandais, néerlandais et danois visités par son comité de recherche. Malgré une journée grise de janvier, il est abondamment baigné de lumière. On y trouve de grands murs fenestrés, peu de corridors, des galeries extérieures qui cerclent le bâtiment sur deux étages. De partout, on peut voir la canopée des arbres, un quartier, le fleuve à proximité.

Au premier niveau, les salles d’exercices grouillent d’activité, tandis que des élèves combinent des calculs mathématiques à la gym. L’énergie est semblable dans les laboratoires créatifs où, regroupés debout autour de tableaux, certains coopèrent pour résoudre un problème. Tout en haut, à l’étage supérieur, le silence se fait entendre malgré la présence d’élèves dispersés dans l’aire ouverte. On y trouve seulement six classes fermées, une bibliothèque ouverte et quantité d’alcôves et de cubicules qui servent au travail individuel ou d’équipe.

Entre ces deux étages, des zones communes sont utilisées pour manger, se détendre ou enseigner. Déployés au cœur de la structure, de grands gradins permettent la circulation entre les étages, mais ont aussi trouvé d’autres utilités. Assis sur les marches de merisier ou calés dans des poufs, quelques élèves y rêvassent, tandis que d’autres discutent ou travaillent. L’espace sera plus tard occupé par une enseignante et sa classe, le temps d’une dictée.

Des possibilités multipliées

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

L’architecte Pierre Thibault et la directrice du collège Sainte-Anne, Isabelle Senécal

L’aménagement du collège Sainte-Anne propose différents contextes d’apprentissage. « À la maison, on adopte des postures différentes selon l’activité. On ne lirait pas à son bureau ou sur une chaise de cuisine, mais dans son salon. C’est la même chose ici », indique Isabelle Senécal. Ainsi, selon les activités et au sein d’un même cours, l’élève peut être invité à se déplacer d’une classe fermée à l’espace commun, d’un cubicule aux gradins. La configuration des classes et des laboratoires est aussi modulable.

Entre deux cours, les gradins se remplissent d’élèves. Aucune cloche n’a sonné. L’agitation sera brève et le niveau sonore, peu élevé, annonce la directrice du collège avec fierté, en ajoutant qu’apprendre à habiter ces lieux ouverts exige une gestion particulière et assidue.

« Changer de structure, c’est changer de culture », disait l’architecte Frank Lloyd Wright. Dans cet environnement, les élèves apprennent l’autonomie, la capacité d’adaptation et la débrouillardise.

« On a beaucoup travaillé sur la pédagogie active. Pour que ça fonctionne, les élèves doivent être engagés dans leur apprentissage et pour les impliquer, les tâches doivent être signifiantes », relève Isabelle Sénécal. La rigidité des contenus, du temps et de l’espace est un carcan, croit-elle. Les matières enseignées en silos, les horaires figés, les postures d’apprentissage statiques sont autant de freins à l’évolution des méthodes d’enseignement. « Nous, on cherche à assouplir le cadre. En permettant aux professeurs de travailler en interdisciplinarité, par exemple, on gagne environ 20 % de temps sur une année. On suit le programme du Ministère à la lettre, mais on peut se permettre de l’enrichir. » Dans cette vision émancipée de l’éducation, les lieux sont autant d’outils pour évoluer autrement.