(Paris) Un peu plus de 14 heures de voyage, un freinage d’urgence en début de soirée – sans conséquences – pour une arrivée en grande pompe avec quinze minutes de retard : le train de nuit entre Berlin et Paris a accompli un premier voyage réussi.

« C’est génial de monter dans un train et de se réveiller à Paris ! » : Annika Volz, une des 15 ambassadrices de l’Office franco-allemand de la jeunesse invitées pour ce trajet inaugural, est ravie.

L’étroitesse des compartiments à six couchettes ? « L’espace est réduit dans les avions aussi », répond-elle du tac au tac. Le train, parti lundi soir de Berlin à 20 h 28 avec dix minutes de retard, est arrivé mardi matin à Paris à 10 h 39, 15 minutes après l’heure prévue.

Entre les deux, plus de 1000 km parcourus dans six voitures toujours un peu dans leur jus malgré la rénovation pratiquée par la compagnie autrichienne ÖBB, à qui appartiennent ces trains.

« Les places assises ont été refaites en 1991, les couchettes entre 1991 et 2000 et les voitures-lits vers 2004 », précise Alain Krakovitch, directeur de TGV-Intercités et membre de la délégation d’officiels accrédités pour le voyage.

« Le ministre-président de Thuringe Bodo Ramelow – monté à bord à l’escale de Halle –, nous a dit qu’il empruntait l’exact même train dans sa jeunesse », s’amuse Erwan Lucas, un autre ambassadeur de l’Ofaj.

Prix attrayant

PHOTO MICHELE TANTUSSI, AGENCE FRANCE-PRESSE

Les voitures-couchettes restent spartiates, avec trois lits superposés de chaque côté dans les compartiments et un couchage étroit et dur.

Les voitures-couchettes restent spartiates, avec trois lits superposés de chaque côté dans les compartiments et un couchage étroit et dur.

« Je suis habitué à renoncer au confort et je pense que ça fait aussi partie du voyage et de l’expérience collective », sourit Erwan Lucas, étudiant français de 20 ans à l’Université libre de Berlin, qui dit avoir dormi « extrêmement bien » même si ce fut court.

Dans les voitures-lits, où des chambres privées pour une, deux ou trois personnes sont disponibles, le confort monte de quelques crans. La place y est vendue à partir de 79,90 euros (117 $), à condition de s’y prendre suffisamment à l’avance.

Erwan Lucas lui a déjà pris sa place pour rentrer à Paris à Noël en train de nuit. « En couchette, ça m’a coûté 69 euros (101 $) non remboursable et non échangeable », détaille-t-il. « Mais c’est un peu la frontière. Si ça commence à aller plus haut… », dit-il évoquant l’option d’un voyage en avion moins coûteux pour les étudiants pris entre leurs budgets restreints et leur conscience des questions écologiques.

Le train de nuit est bien sûr destiné aux jeunes et aux étudiants, mais la SNCF, la Deutsche Bahn et les gouvernements allemands et français qui ont œuvré à la relance de cette ligne interrompue pendant neuf ans, veulent aussi attirer des familles, voire des professionnels en voyage d’affaires.

« Manœuvre compliquée »

PHOTO MICHELE TANTUSSI, AGENCE FRANCE-PRESSE

Dans les voitures-lits, où des chambres privées pour une, deux ou trois personnes sont disponibles, le confort monte de quelques crans.

L’heure d’arrivée du train à Paris, 10 h 24, constitue un frein pour ce type de clientèle admettent toutefois les passagers de ce premier train, qui ne transportait que des invités, mais aucun client « classique » ayant payé son billet.

L’absence de voiture-bar pour se dégourdir les jambes en dehors de sa cabine était également déplorée par un cadre de la SNCF.

La remise en route de cette ligne a nécessité une coordination importante entre les compagnies française, allemande, belge et autrichienne, souligne la SNCF. En gare de Mannheim, les trains marquent un arrêt technique au milieu de la nuit pour récupérer des voitures en provenance de Vienne et finir la route vers Paris. Une autre partie du train prend la route de Bruxelles.

« On fait une manœuvre compliquée en pleine nuit, mais on y arrive, et le voyageur ne se rend même pas compte de cette cuisine interne », lâchait émerveillé le PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou à l’arrivée à Paris.

Il faut aussi changer de locomotive pour passer d’Allemagne en France puisque seules cinq motrices sont habilitées à le faire pour des raisons de normes nationales divergentes. Le train roule donc plus lentement en France – 140 km/h contre 200 km/h en Allemagne.

Une occasion pour les voyageurs de mieux admirer la campagne des bords de Marne sous la brume du petit matin à l’approche de Paris.