L’option de travailler à distance serait associée aux emplois où l’anglais est plus fréquemment utilisé, selon Statistique Canada.

Plus souvent en anglais

Quel est le lien entre le travail à domicile et les langues utilisées au travail ? Une nouvelle étude de Statistique Canada montre que, même si l’utilisation du français demeure supérieure à l’anglais en télétravail, « les personnes travaillant à domicile tendent à utiliser plus souvent l’anglais au travail que les autres travailleurs, et étaient également plus susceptibles d’utiliser les deux langues officielles au travail ». Pour faire leur analyse, les chercheurs ont analysé les données de 2021 pour les travailleurs des régions de Montréal, d’Ottawa-Gatineau et de Moncton.

Déplacement vers le télétravail

Louis Cornelissen, analyste au centre de démographie de Statistique Canada et auteur de l’étude, note que le télétravail ne touche pas tous les types d’emplois de façon uniforme. « On sait que le télétravail est plus fréquent dans divers secteurs tels que les emplois de bureau, la finance, l’assurance, des services professionnels et techniques, l’architecture, l’industrie de l’information et de la culture, dit-il en entrevue. Ce sont des domaines où l’utilisation de l’anglais au travail était plus prononcée avant la pandémie. Avec la montée du télétravail, on constate un déplacement vers l’utilisation de l’anglais dans ce contexte de travail à distance. »

Différences selon le domaine

Ainsi, dans la région de Montréal, 56 % des personnes travaillant à domicile utilisaient principalement le français au travail, comparativement aux autres travailleurs qui utilisaient principalement le français dans une proportion de 75 %, note Statistique Canada. Cette différence d’environ 20 points de pourcentage a intrigué M. Cornelissen. « Nous avons tenté de contrôler ces différences pour tenir compte des caractéristiques des emplois. Nous avons réalisé que le type d’emploi était responsable de 15 points de pourcentage de cet écart [les trois quarts]. C’est donc dire qu’il y a 5 points de pourcentage d’écart [le quart] qui ne s’explique pas par le type d’emploi ou le domaine dans lequel le travail est exercé. »

Nouveauté à suivre

Ces cinq points d’écart en faveur de l’utilisation de l’anglais dans un contexte de télétravail demandent à être explorés davantage, signale l’expert. « D’où vient l’écart ? C’est difficile à dire. Une hypothèse est qu’il pourrait y avoir des différences dans la nature du travail qui influencent l’utilisation des langues, bien que cela ne semble pas être la raison principale. Une meilleure hypothèse est la possibilité qu’une personne se mette à travailler à distance pour un employeur situé ailleurs au Canada ou ailleurs dans le monde, ce qui représente une nouveauté à surveiller. »

Situations particulières

Le télétravail reste encore surtout un phénomène local : quatre travailleurs en télétravail sur cinq au Canada travaillent pour un employeur situé dans leur localité. C’est donc dire qu’un télétravailleur sur cinq travaille pour un employeur qui peut être situé ailleurs dans sa province, ou alors dans une autre province ou un autre pays. « Il est vraisemblable que ces travailleurs seraient plus susceptibles de travailler principalement en anglais que leurs homologues travaillant pour des employeurs basés dans les grandes villes à forte présence francophone, note M. Cornelissen. Le constat est que nous ne comprenons pas entièrement les implications de la nouvelle réalité du télétravail. En soi, il n’y a pas d’indications claires de changements dans l’utilisation des langues au travail. Mais il est possible que des situations particulières se présentent, ce qui mérite d’être exploré. »