L’homme floué par la courtière immobilière vedette Christine Girouard et son conjoint également courtier, Jonathan Dauphinais-Fortin, espère qu’il pourra récupérer bientôt son argent. Le comité de discipline de l’OACIQ a déclaré le couple de courtiers coupable sur toute la ligne.

La victime a téléphoné à l’Organisme d’autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ) mercredi lorsqu’il a vu l’annonce de la décision du comité de discipline publiée dans les médias. Personne ne lui avait donné de nouvelles depuis la journée de son témoignage, en septembre 2023.

La Presse ne peut plus identifier cette personne et sa famille à cause d’une ordonnance de non-publication.

« On m’avait dit que ça prendrait 90 jours avant que le comité de discipline donne sa décision, a-t-il raconté à La Presse. Comme ça faisait plus de 100 jours, je me suis demandé s’il allait vraiment y avoir une décision de rendue. »

Sa famille et lui se sont dits soulagés d’avoir enfin un verdict.

« Quand j’ai lu que l’avocat de Mme Girouard avait dit lors des audiences que la fraude de 40 000 $ était considérée comme des pinottes, j’ai trouvé ces propos insultants. Ça m’a choqué. Pour ma famille et moi, ces milliers de dollars ne sont pas des pinottes. »

Le 22 février 2022, l’homme a fait une promesse d’achat de 410 000 $ pour une maison à Repentigny vendue par la courtière au prix affiché de 399 700 $. Après le dépôt de la promesse d’achat, Mme Girouard a informé son courtier de la présence d’une autre promesse d’achat, celle bidon de l’ex-conjointe du courtier Jonathan Dauphinais-Fortin, qui travaillait à la même agence que Christine Girouard. Le couple a donc bonifié son offre à 450 000 $, et elle a été acceptée.

« Quand je repense à cette demande de bonification que Mme Girouard a faite à mon courtier et à moi qui met de l’argent supplémentaire, comme si ça n’avait aucune conséquence dans une vie d’ajouter plus d’argent, je me dis que c’est incroyable. Incroyable de penser comme ça. J’ai compris qu’on ne vivait pas dans le même monde. »

Pour l’instant, celui qui est à l’origine de la plainte tient à souligner qu’il est satisfait de l’OACIQ, qui a pris cette affaire à cœur, dit-il, et qui a fait les choses correctement.

« J’attends la fin pour donner ma satisfaction à 100 %, soutient-il. Comme victime, est-ce que je resterai victime ou bien est-ce que je serai dédommagé et à quelle hauteur ? », se questionne-t-il.

Des contacts avec l’OACIQ

Après quelques conversations avec l’OACIQ, notamment l’avocate de l’OACIQ, MIsabelle Martel, il a reçu des documents à remplir par courriel.

L’OACIQ rappelle que l’acheteur floué peut obtenir de l’aide du Fonds d’indemnisation du courtage immobilier du Québec (FICI). L’indemnisation peut atteindre 100 000 $.

« Le mécanisme de demande d’indemnisation peut être initié en même temps de façon parallèle aux démarches d’enquête qu’on effectue. On n’est pas obligé d’attendre qu’il y ait une culpabilité qui soit prononcée », explique MCaroline Champagne, vice-présidente Encadrement de l’OACIQ, qui précise qu’elle ne peut pas parler de ce dossier en particulier pour des raisons de confidentialité. Par conséquent, elle ne peut pas dire dans combien de temps il pourra recevoir une indemnisation.

Un consommateur dont le courtier a commis une faute déontologique peut quant à lui se tourner vers le Fonds d’assurance responsabilité professionnelle du courtage immobilier du Québec (FARCIQ).

« Ce n’est pas nécessaire d’être représenté par un avocat. C’est le cumul de la preuve qui a été recueillie que va étudier le comité d’indemnisation », assure MCaroline Champagne.

Un système basé sur la confiance

« On n’est pas surpris de la décision de l’OACIQ », affirme en entrevue Guillaume LaBarre, chef de la direction à l’Association professionnelle des courtiers immobiliers du Québec (APCIQ), qui tient à préciser que « les agissements de Mme Girouard et M. Dauphinais-Fortin sont des choses qui sont rares ».

Questionné pour savoir comment il est possible d’affirmer que ce sont des gestes rares alors que le système actuel est basé sur la confiance et ne permet pas de vérifier chaque transaction, à moins de procéder à une enquête, M. LaBarre répond ceci :

« Est-ce que la loi est optimale, est-ce que la loi décrit des choses qui permettent d’avoir une transparence absolue ? Ça, évidemment, ce sont des questions importantes, puis vous avez raison de les soulever. On en discute par notre comité d’action politique, qui se penche aussi sur les pratiques du courtage. Mais ce que je peux vous dire à ce moment, c’est que nous, à l’APCIQ, envers nos membres, on fait la promotion du respect scrupuleux du code de déontologie, puis des bonnes pratiques et surtout de la loi sur le courtage. »

L’APCIQ et l’OACIQ se sont dits satisfaits de la décision du comité de discipline et espèrent qu’elle aura un effet dissuasif auprès des autres titulaires de permis.

Selon l’OACIQ, depuis la médiatisation de cette affaire en mai 2023 et les procédures qui ont suivi, les demandes d’assistance de la part d’acheteurs craignant d’avoir eux aussi été victimes d’un stratagème frauduleux ont augmenté de 20 %.

La date des audiences qui détermineront les sanctions des deux courtiers n’a pas encore été fixée.