Le 10 janvier dernier, le statut Facebook d’une résidente de Rouyn-Noranda a annoncé que le seul oncologue de la MRC allait quitter définitivement la région, générant évidemment, tout un émoi au sein de la communauté.

Bien que le député local ait contourné le sujet lors d’une entrevue à Radio-Canada, abordant plutôt les enjeux de rétention de personnel spécialisé en région et les nouvelles technologies pour assurer un suivi médical hybride, il apparaît évident que la qualité de l’air soit la raison principale de son départ.

C’est d’ailleurs ce que le médecin, nouvellement père, a communiqué à certains de ses patients1. Loin de nous l’idée de l’en blâmer. On ne peut que comprendre et appuyer tout parent qui souhaite éloigner ses enfants d’une industrie qui détient un permis de polluer qui l’autorise à émettre jusqu’à 22 fois la norme pour l’arsenic, 3 fois la norme pour le cadmium et 4,5 fois la norme pour le plomb, sans compter un cocktail de plus de 30 autres contaminants dont le détail demeure, encore à ce jour, une information de laquelle l’exclusive connaissance appartient à Glencore.

Des études de la santé publique2 ont démontré qu’il y avait une incidence de 30 % plus de cancers du poumon chez la population locale.

Qui sait ce qui ressortirait si notre gouvernement effectuait les mêmes recherches pour d’autres types de cancers ; les maladies coronariennes, neurologiques ou encore le diabète de type 2 reconnu comme étant lié à la présence d’arsenic dans le corps chez les hommes ?

Dites-nous, qui voudrait sciemment exposer son enfant à tous ces risques ?

Quant au député Daniel Bernard, ex-lobbyiste pour l’industrie minière, son discours semble vraiment déconnecté lorsqu’il affirme demeurer optimiste3, faisant d’un même souffle la promotion de la future Agence santé Québec et sa télémédecine, tout en négligeant volontairement de mentionner les raisons du départ de ce médecin. Il est absolument déplorable que les journalistes locaux ne talonnent pas davantage les élus qui ont décidé de taire ces raisons. Cet éléphant dans la pièce qu’est la fonderie Horne est-il devenu l’industrie-dont-il-ne-faut-pas-prononcer-le-nom ?

Deviendrons-nous le plus gros tabou du Québec avec nos cancers, nos sols contaminés et notre zone tampon aux limites aussi invisibles que notre population ?

Nous savons que les médecins et les équipes médicales sont dévoués au bien-être de leurs patients et patientes, et que les oncologues volants font un très bon travail. Il demeure que rien ne peut remplacer une relation médecin-patient et l’accès local à un ou une spécialiste, surtout lorsqu’il s’agit d’élaborer un traitement au cours d’un des moments les plus difficiles à traverser dans une vie.

Traiter un cancer n’est jamais banal, ni physiquement ni psychologiquement. Nous doutons énormément que des rencontres virtuelles avec un oncologue soient une panacée et arrivent à pallier ce manque. Nous nous retrouvons donc avec un tout nouveau centre d’oncologie, sans aucun oncologue pour y pratiquer.

Qu’attend donc le gouvernement Legault pour régler le problème à la source ? Exiger de la fonderie qu’elle respecte les normes pour les contaminants permettrait à la fois de réduire les risques de cancer dans la population et de rétablir un peu d’attractivité pour notre ville. Qui pourrait refuser une telle solution gagnant-gagnant ? N’est-ce pas, Monsieur Legault ?

1. Regardez « Rouyn-Noranda : Le seul hémato-oncologue pourrait quitter son poste » 2. Consultez le Rapport de l’étude de biosurveillance menée à l’automne 2018 3. Lisez « Oncologie à Rouyn-Noranda : Daniel Bernard demeure optimiste »