Nous sommes venus nous installer en Gaspésie. Pour le ski, les montagnes, le fleuve, le plein air. Depuis quelques années, nous sommes de plus en plus nombreux. De partout au Québec. Des jeunes et des moins jeunes qui ont des projets d’avenir, qui fondent une famille, qui sont des amoureux de la nature. Nous avons bâti quelque chose de fort et redonnons un nouveau souffle aux villages de la Haute-Gaspésie, le parent pauvre de la péninsule.

Nous avons ouvert des restaurants, des boutiques de plein air, des hébergements touristiques, démarré des projets d’affaires dans le domaine du ski hors-piste et d’autres activités récréotouristiques, etc. D’une région-ressource dévitalisée et dépendante des industries extractives, la Gaspésie est devenue une région phare du tourisme durable avec des communautés plus fortes et diversifiées.

Mais pour imaginer un avenir ici, nous devons d’abord avoir accès à la nature afin de pratiquer des sports de montagne dans un environnement unique. Cet accès est essentiel afin d’attirer des clients, de répondre aux attentes de nos visiteurs et de permettre à la communauté locale de vivre décemment. L’avenir de la Haute-Gaspésie en dépend, rien de moins.

Avec l’hiver difficile que l’on vient de connaître, on se rend rapidement compte que sans accès au territoire en altitude, sans gestion dynamique du territoire, sans la possibilité d’aménager de nouvelles montagnes de façon durable, cette vision que nous avons de la Haute-Gaspésie comme un paradis du plein air au Québec risque de tomber à l’eau… et c’est toute l’industrie récréotouristique qui en paie le prix.

Doit-on comprendre que le gouvernement provincial souhaite fermer la Gaspésie six mois par année au bénéfice d’autres régions, dont la plupart sont situées à l’extérieur du Québec ?

Ça fait cinq ans que l’on attend que la Stratégie pour les caribous forestiers et montagnards soit rendue publique afin de nous permettre d’accéder aux secteurs alpins et d’œuvrer au développement durable de ceux-ci.

Ça fait cinq ans qu’on nous demande d’attendre un petit peu plus longtemps, qu’on nous dit que ça s’en vient.

Ça fait cinq ans qu’on se demande comment nous pourrons gagner notre vie au-delà de l’année en cours.

Ça fait cinq ans que le bien-être de notre région et de ses communautés est mis de côté par le gouvernement provincial.

Aujourd’hui, nous sommes épuisés. Nous sommes découragés. Nous ne savons plus à qui nous adresser afin que l’industrie récréotouristique soit reconnue comme le moteur économique de notre région.

Nous sommes fatigués d’entendre parler des différentes mesures destinées à soutenir l’entrepreneuriat responsable au Québec alors que nous sommes privés de notre gagne-pain depuis cinq ans. Nous avons faim, nous avons soif d’une vie de qualité au sein d’un environnement auquel nous accordons la plus grande importance.

PHOTO DAVID BOILY, ARCHIVES LA PRESSE

Deux caribous photographiés sur la rive nord du Saint-Laurent. Les populations de ce cervidé sont en déclin à de nombreux endroits au Québec.

Pourtant, des solutions pour allier activités récréotouristiques et protection d’espèces menacées, nous en avons.

Pour faire face aux hivers difficiles qui nous attendent tout en préservant l’écosystème, il faut un meilleur accès à l’arrière-pays, accroître les secteurs accessibles, tout en déployant un mode de gestion dynamique du territoire afin de nous assurer que les caribous soient respectés et protégés. Nous habitons ce territoire, nous le savourons quotidiennement, nous le connaissons comme le fond de notre poche, nous voulons le protéger et continuer à le parcourir. Mais nous avons l’impression que nous sommes laissés de côté, oubliés.

Monsieur Legault, ça suffit ! Nous n’avons plus les moyens d’attendre « un petit peu plus longtemps ».

* Mobilisation soutenue par 78 entreprises et personnes du milieu récréotouristique de la Haute-Gaspésie.

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